Le 30 juin 2006, le sursis accordé aux élèves sans papiers
et à leurs parents tombera. Des milliers d’enfants, de
jeunes et leurs familles risquent l’expulsion en masse,
verront leur avenir et leur vie même anéantis. Nous ne
laisserons pas commettre ces infamies en notre nom. Chacun
avec les moyens qui sont les nôtres, nous leur apporterons
notre soutien, notre parrainage, notre protection. S’ils
nous demandent asile, nous ne leur fermerons pas notre
porte, nous les hébergerons et les nourrirons ; nous ne les
dénoncerons pas à la police.
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Pour des milliers d’enfants et de jeunes majeurs, le 30 juin
2006 ne marquera pas le début des vacances d’été, mais bien
le commencement d’un calvaire. En effet, à cette date, le
sursis que M. Sarkozy avait dû accorder aux jeunes majeurs
sans papiers scolarisés et aux parents d’enfants scolarisés
tombera. Suspendues parce que les mobilisations d’écoles et
de lycées se multipliaient, les expulsions reprendront.
Ainsi, en guise de vacances, des milliers de jeunes et
d’enfants joueront aux fugitifs, en vrai, avec ou sans leurs
parents, guettant les bruits de pas à l’heure du laitier,
tremblant à la vue d’un uniforme et vivant dans la hantise
de perdre à jamais leur école, leurs enseignants, leurs
copains. S’ils sont arrêtés, le grand jeu de leur été sera
un petit rôle dans un film policier sordide :
l’interpellation, seul ou en famille, les parents rudoyés,
48 heures de garde à vue dans une cellule de commissariat
puis deux ou quatre semaines en rétention, crasse, bruit,
violence et promiscuité assurés, et, pour finir, un
aller-simple vers un pays qu’ils ne connaissent pas ou plus,
dont certains ne parlent pas (ou plus) la langue, papa-maman
menottés, entravés comme des bêtes et attachés à leurs sièges.
A l’arrivée, ce sera pour la plupart l’extrême misère : pas
de logement ou le bidonville, pas de travail et pas d’espoir
d’en trouver. Des persécutions, parfois les plus atroces,
contre ceux que la France a débouté du droit d’asile. Ils
paieront pour les raisons pour lesquelles ils avaient fui et
certains pour avoir dénoncé leurs tortionnaires à
l’étranger. Pour les enfants, pas d’école, dans des pays où
la scolarisation est un luxe. C’est ce gâchis qui se cache
derrière les chiffres records d’expulsions annoncés avec
satisfaction par le ministre de l’Intérieur : des milliers
de vies propulsées dans l’indigence et parfois achevées sous
la torture !
Nous ne laisserons pas détruire la vie de ces enfants, de
ces adolescents et de leurs parents. Ils sont nos élèves,
les copains de nos élèves ou de nos enfants. Ils ont
commencé d’étudier dans ce pays, ils en parlent la langue,
ils ont les mêmes joies et, hélas, des soucis bien plus
grands que les camarades de leur âge. S’ils décident (ou,
pour les plus jeunes, si leurs parents décident) d’échapper
à une expulsion honteuse, nous les y aiderons comme nous
avons aidé Rachel et Jonathan à Sens, Samuel à Pau, Ming et
Wei-Ying à Evreux. Nous sommes solidaires de ceux qui les
accueilleraient. S’ils demandent asile, nous ne fermerons
pas notre porte.
Cela contrevient aux lois en vigueur. Mais l’enseignement
que nous avons à dispenser à nos élèves ou l’éducation que
nous devons à nos enfants ne peut pas être l’exemple de la
soumission à un ordre injuste. Chacun a en mémoire les
épisodes où face à des persécutions insupportables, chacun a
dû faire des choix. Et où ne pas choisir était choisir de
laisser faire. Et pas seulement dans les périodes de
dictature. Rosa Parks, emprisonnée à Atlanta en 1951 pour
avoir enfreint les lois ségrégationnistes aurait-elle dû se
soumettre au prétexte que ces lois avaient été «
démocratiquement » prises ? Le général Paris de la
Bollardière, mis aux arrêts pour avoir dénoncé les tortures
de l’armée française en Algérie, aurait-il dû se taire parce
que la France était une démocratie ?
Nous ne laisserons pas se commettre des infamies en notre nom.