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Que s’est il passé à Hérouville aux Municipales

 

Les résultats des municipales et des cantonales à Hérouville apparaissent comme une exception dans le champ politique actuel.

Cette situation paraît d’autant moins compréhensible que lors des présidentielles 2007 Ségolène Royal (7133 voix) avait fait 67,43 % des voix au deuxième tour et que Rodolphe Thomas réélu au premier tour (4425 voix) des municipales avait été battu par la socialiste Laurence Dumont aux législatives par 53,62 % des voix (4549 voix) au deuxième tour.

Certains d’entre nous avaient émis cette hypothèse. Le résultat a cependant surpris par son ampleur. Je pensais personnellement qu’avec deux listes à gauche c’était improbable.

Quelques chiffres.

Un petit comparatif entre les élections de 2001 et celle de 2008 peut donner certaines pistes :

(GIF)
résultats

Évidement pour comparer, il faut des grandeurs équivalentes le premier tableau corrige l’augmentation des inscrits entre les deux élections.

On constate :

· Que la progression de la gauche plurielle est pratiquement annulée par les pertes de la gauche de la gauche,

· Une forte mobilisation à droite.

· Une incapacité de la gauche plurielle à mobiliser.

Le second tableau, plus discutable sur le principe puisqu’on imagine qu’il y a eu autant de votants les deux fois, montre :

· Ce qui pourrait être l’effet local Thomas augmentation de la notoriété lié à l’exercice du pouvoir,

· L’incapacité de la gauche plurielle à mobiliser,

· La dilapidation du potentiel de la gauche de la gauche (1170 voix aux présidentielles de 2007 dont 720 pour Besancenot, auxquels on pourrait rajouter les 185 voix de MG Buffet).

Un dernier chiffre avec 4425 voix Thomas réalise à 100 voix près le score de la droite hors FN (617 voix) du premier tour des présidentielles.

La réalité est sans doute un peu plus complexe. Sans doute une bonne partie, probablement plus de la moitié, des électeurs de Koueta de 2001 (Arc en Ciel) ont voté à gauche ou se sont abstenus. L’extrême droite a certainement voté pour Thomas.

Thomas avec une liste assez ouverte (présence d’anciens socialistes Kouéta, Gauthier, ouverture vers l’Afrique et le Maghreb , Ky , Habib ressentis aussi comme des gens plutôt de gauche, de syndicaliste et d’associatifs Bonnissent...) a joué avec réussite une carte Modem ouverte à toutes les bonnes volontés.

Il a très certainement arrosé avec les fonds sociaux juste avant les municipales, fait des promesses à l’AICC (Musulman), etc...à sa manière clientéliste, et partant perdant a réussi à mobiliser à la fois les milieux traditionnels de droite, la droite musulmane religieuse et une partie des gens arrosés avec les divers fonds (en particulier chez les plus défavorisés).

Ceci ne doit pas masquer l’autre réalité, l’incapacité de la gauche à mobiliser sur une politique et un programme.

La campagne elle-même est témoin de cette incapacité :

· La LCR s’est contentée de « tous avec Besancenot » avec le résultat vu ci-dessus, un échec (les affiches de leur réunion donnait l’impression qu’il s’agissait d’un meeting de Besancenot).

· La gauche plurielle a fait campagne avec un programme municipal flou, et des attaques contre Thomas dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles furent maladroites (photo de Thomas avec Sarkozy immédiatement contrée par la même photo sur un autre plan de Sarkozy avec Thomas et Duron - Tract sur l’usine de décarbonatation s’appuyant sur une lettre du laboratoire Gilbert aussitôt contrée par une lettre du même laboratoire). Mais surtout rien sur la politique du gouvernement et ses impacts sur la vie locale etc...

La notoriété d’Emmanuel Renard (qui avait fait campagne pour le OUI au TCE) ne pouvait compenser ce déficit de politique.

Finalement Hérouville plus qu’une exception serait le témoin de l’incapacité de la gauche et de l’extrême gauche à proposer une alternative, dans un contexte d’identification politique flou.

Comment en est on arrivé là ?

Il faut peut être se souvenir qu’à Hérouville le NON au TCE avait recueilli 58,9 % des voix avec un taux de participation de 75 %, malgré le vote majoritaire de la section PS pour le OUI et l’appel des élus Verts à voter OUI.

Le vote massif anti Sarkozy des présidentielles et le NON massif au TCE montre s’il le fallait, la grande défiance des hérouvillais vis-à-vis des politiques libérales.

Il y a deux ans nous avions proposé une démarche à la gauche hérouvillaise :

· Travailler sur le programme municipal en s’appuyant sur les associations et des forums publics pour examiner les divergences aboutir à des propositions concrètes,

· Préparer un accord de deuxième tour en laissant au premier tour les divergences tant sur le plan politique général que sur le plan politique local s’exprimer de sorte que les électeurs tranchent

Les forums ont commencé à se mettre en place, sans la participation de la LCR (rien avec le PS), et 4 forums ont eu lieu montrant qu’il existait des divergences sur la politique locale. Au lieu de tenter de formaliser ces divergences la politique du PS et du MRC a été principalement de les nier. Puis dès Juin 2007, le PS et le MRC ont sifflé la fin de la partie et on est revenu à des discussions de couloir entre organisations sous la houlette du PS.

Nous avons proposé au PCF et au Verts de bâtir une liste commune clairement anti-libérale à laquelle pourrait s’associer la LCR en poursuivant la logique des forums. Les Verts nous ont expliqué que cela dépendait de nous et du PCF, que si nous n’allions pas avec le PS (nous et le PCF), soit il présenterait une liste soit ils iraient avec nous.

Le PCF local, nous a expliqué que la décision ne leur appartenait pas, que c’était la fédération départementale qui décidait. Pourtant dans d’autres villes les sections locales n’ont pas suivi la ligne de la fédération. On connaît la suite.

La LCR quant à elle ne voulait aucune discussion avec le PCF et encore moins avec les Verts. La discussion avec la LCR a montré à ceux qui y participaient qu’elle ne souhaitait faire alliance qu’avec elle-même : tout point de divergence devenait au cours de la discussion un préalable à l’action commune. En fait la LCR hérouvillaise dirigée par son mentor, Christian Eury, défend une ligne ultra-sectaire, contrairement à ce qui a pu se faire dans d’autres lieux, y compris avec le PS ou le MRC.

Dès lors la machine à perdre était en place entre une gauche plurielle plus rassemblée sur « contre Thomas tous unis » que sur une réelle alternative et une LCR dans une démarche uniquement de témoignage.

Ceci s’est fait d’autant plus facilement que la plupart des responsables d’associations qui en avaient « raz-le-bol » de Thomas ont fortement fait pression pour une liste unie de la gauche dès le premier tour, sans mesurer que, sans alternative et perspectives claires, la majorité des hérouvillais n’avaient pas particulièrement de raison de choisir entre deux candidatures qui avaient soutenu le Traité Constitutionnel Européen (la position du PS à propos du nouveau traité a sans doute renforcé cette état d’esprit), ni de remettre au pouvoir une gauche à peine rénovée et sans perspectives.

Ainsi en ne déplaçant pas le débat municipal vers les perspectives à gauche, ce qui aurait obliger la droite à se définir par rapport à celui-ci, et aurait eu un effet mobilisateur à gauche et dévastateur dans la liste de Thomas, en premier lieu, le PCF et la LCR ont permis une campagne molle, laissant le loisir à Thomas de voguer sur l’ouverture de la politique locale, dont les aspects néfastes ne se font pas encore sentir massivement, sans qu’il ait à se déterminer sur le champ politique global.

Quant à nous deux choix restaient dans notre possibilité :

· Rejoindre la liste de Gauche Unitaire, cela aurait été possible, mais cela n’aurait rien changé si ce n’est de plonger une nouvelle fois avec le navire de la gauche plurielle,

· Soit nous taire.

Le 25 Mars 2008

26 mars 2008


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