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DIRE " NON " AU TRAITE CONSTITUTIONNEL, POUR CONSTRUIRE L’EUROPE !

Conférence de presse du 20 octobre - Intervention liminaire de Yves Salesse, président de la Fondation Copernic

 

La ratification du « traité constitutionnel pour l¹Europe » porte un enjeu majeur : quels seront les fondements de la construction européenne pour la période à venir ?

Il y a, à ce sujet, une première bonne nouvelle. Le plus souvent les mauvais coups de l¹Europe libérale passaient d¹abord inaperçus, n¹étaient découverts qu¹après leur mise en oeuvre. Pour cette fois, nous sentons la possibilité d¹un débat touchant des millions de personnes et susceptible d¹enrayer la machine néo-libérale.

Les partisans du « Oui » ne répondent pas à notre première critique qui devrait émouvoir quiconque attache quelqu¹importance au débat démocratique : il est inadmissible d¹inscrire dans un tel texte des politiques précises et contraignantes qui ne pourront plus être modifiées qu¹à l¹unanimité d¹au moins 25 Etats. C¹est là un vice antidémocratique radical qui suffit à rejeter ce texte.

Et ces politiques sont le fruit de l¹accumulation des offensives libérales transcrites dans l¹Acte unique, Maastricht, Amsterdam ... Pour éviter ce grief essentiel, vient ce que j¹ai appelé « le temps des berceuses ». « Certes l¹Europe n¹est pas sociale, attaque les services publics, mais tout cela va changer. Acceptons la Constitution, et demain nous obtiendrons un traité social ». Bien sûr, ils n¹y croient pas. Le fait nouveau est qu¹il y a de moins en moins de monde pour les croire.

Plutôt que d¹accepter de se prononcer sur la question posée : « est-ce là un socle acceptable pour l¹Europe ? », les défenseurs du « Oui » se replient dans une pesée au trébuchet des avancées par rapport aux traités actuels. Mais cet argument subsidiaire ne vaut guère mieux. Il réclame quelques contre-vérités flagrantes : « la constitution n¹apporte que des avancées ; elle fournit pour la première fois une base juridique aux services publics ; elle facilite les coopération renforcées ; etc. » Contre-vérités que nous avons vite éventées.

Vient alors l¹amalgame scandaleux : « Le Pen, Maigret, De Villiers votent non. Et vous ? » qui a honoré le site de Dominique Strauss-Kahn et a dû être retiré.

C¹est là qu¹intervient la deuxième bonne nouvelle. Le « Non » est de moins en moins incarné par ces gens là. Notre appel, les forces qu¹il rassemble déjà et qui s¹élargiront encore, militants associatifs et politiques, syndicalistes, universitaires, chercheurs, professionnels du spectacle, juristes, hauts-fonctionnaires, etc. affirment clairement : « Nous avons besoin d¹Europe » ; « nous sommes des constructeurs résolus de l¹Europe » ; « il faut dire Non pour construire l¹Europe ». Une Europe capable d¹infléchir la marche du monde, de défendre les acquis de deux siècles de luttes ouvrières et populaires, de les enrichir d¹autres dimensions, comme le féminisme ou l¹écologie.

Au nom de cette Europe, que les uns et les autres avons déclinée en nombre de propositions concrètes, nous dévoilons le détournement de symbole, et donc le détournement politique qui veut nous faire prendre une entreprise « qui a le marché pour idole et la négociation secrète pour liturgie » pour la construction de l¹Europe. Alors que cette entreprise révèle chaque jour plus clairement son incapacité à répondre aux besoins des peuples, de peser sur la situation internationale. Entreprise atteinte d¹une maladie dégénérative chaque jour plus évidente.

Reste alors aux défenseurs du « Oui » le recours à la fiction. Dans une tribune parue hier soir, trois auteurs dont martine Aubry tentent d¹inquiéter : « Essayons d¹imaginer une Europe en crise face aux grands enjeux du moment ». Il n¹est nul besoin d¹imagination ; regarder la réalité suffit : l¹actuelle construction européenne est en crise, seulement capable de pousser l¹ouverture au marché. Elle ne pèse de rien sur « les grands enjeux du moment », atteinte d¹une maladie dégénérative chaque jour plus évidente.

C¹est pourquoi nous sommes convaincus que la bataille pour « Une autre Europe » est une contribution essentielle à la bataille du « Non ». Nous ne sommes pas un cartel des Non parce que nous ne sommes pas un cartel d¹organisations et parce que nous nous contentons pas du Non. Cet engagement pour une autre Europe n¹est pas d¹occasion. Notre rencontre n¹est pas fortuite : elle s¹est annoncée dans nos actions pour la défense de l¹Etat social, des services publics, contre la guerre, pour d¹autres relations avec les pays du Sud, pour les droits des femmes, des étrangers. Nous avons déjà agi ensemble et réfléchi ensemble.

Nous allons travailler à rassembler tous ceux qui ont participé à ces luttes et nous tourner vers l¹ensemble de nos concitoyens. Nous appelons à ce que des collectifs se constituent, les plus nombreux possibles, au plus près de ceux qui vivent quotidiennement le prix des politiques libérales. Les tenants de l¹actuelle construction européenne veulent valider en bloc le traité de Rome aggravé par l¹Acte unique, aggravé par Maastricht, aggravé par Amsterdam ; c¹est à dire l¹ensemble juridique le plus minutieusement libéral de la planète. Mais les jeux ne sont pas faits.

pour lire l’appel

et la liste des signataires

21 octobre 2004


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