Accueil > Penser Global

Le Cne de Sarkozy : un contrat maudit

un article de Gérard Filoche à lire et faire connaître

Un vrai débat de campagne électorale...ce n’est pas monter "des affaires"...

Le Monde d’hier et tous les grands médias préfèrent parler des RG ou d’autre “affaire” que du Cne, de la suppression du droit du licenciement et de la proposition du Medef, dans un grand show, de faire un autodafé avec le Code du travail...

Pendant ce temps-là, on laisse dire à Sarkozy non seulement qu’il est pour le licenciement sans motif tout au long de la vie professionnelle dans un contrat unique... en étendant le Cne

Mais on le laisse dire que "le Cne" est une réussite ...

Alors que le Cne est l’apogée de la précarité et un contrat maudit

 

On nous abreuve d’une prétendue « polémique » pour ou contre les bienfaits du Cne, ce « contrat nouvelle embauche » institué sans concertation par ordonnance, c’est-à-dire par un coup de force du ministre Villepin en plein été 2005. On cherche à nous faire participer à un « débat » sur l’intérêt d’un tel Cne qui se serait, paraît-il, « installé » dans le paysage (sic, France inter). Mais ce dont il s’agit, c’est d’un recul des droits de l’homme et du travail en même temps.

Le Cne, c’est la pire atteinte que l’on puisse faire à un salarié : l’atteinte à sa dignité ! On peut le « virer » à nouveau du jour au lendemain sans motif : c’est le retour au XIX° siècle, à Zola, le porion peut « virer » le mineur Lantier, le réduire à la mendicité, sans même que le patron lui jette un regard. Et l’on nous affirme, qu’il vaut mieux que les Lantier d’aujourd’hui soient à nouveau soumis à ce régime, plient l’échine, ne puissent de syndiquer, ni se révolter, plutôt que d’être au chômage !

On croyait cet esclavage révolu : la convention internationale n°158 de l’Oit affirme que l’on ne peut « licencier sans motif », toutes les déclarations des droits de l’homme affirment que l’on ne peut « licencier sans motif ». Et la France - qui n’a jamais été aussi riche - de MM Chirac-Villepin-Sarkozy-Dutreil a rétabli sous le prétexte mensonger de lutter contre le chômage, la possibilité d’un employeur de fouler aux pieds la dignité élémentaire d’un humain qui travaille pour lui : « - Dehors !... et je n’ai pas à dire pourquoi ! ».

Il n’y a pas de « débat » possible autour du Cne, il n’y a qu’un combat : un combat pour le droit, un combat pour la dignité, un combat pour le droit élémentaire du licenciement.

La prétention qu’il y ait aujourd’hui 750 000 emplois créés par le Cne est une fable indigne : ce sont des substitutions aux Cdd et à d’autres contrats atypiques précaires. il y aurait eu en août dernier, au bout d’un an, 550 000 Cne, mais seulement, d’après une enquête d’opinion auprès de chefs d’entreprise, 10 % (sic) seulement n’auraient pas été créés autrement. Ce qui en fait un des moins “performants” des contrats précaires. (Il y a 950 Cdd, 650 000 intérimaires, 800 000 saisonniers, 3,7 millions de temps partiels, ces chiffres se recoupant aussi

La même enquête affirmait que 30 % des Cne ont été interrompus « avant six mois » ! Cela signifie que 180 000 salariés ont été « jetés » sans motif, sans droit, sans explication, sans défense, et il n’y aurait, hélas, que 370 plaintes aux prud’hommes recensées, soit autour de 0,2 %. Mais ces plaintes trouvent écho auprès des juges, en attendant la décision du Bit a priori défavorable en vertu de la convention internationale n°158.

On nous dit que la rupture émanerait du salarié dans 45 % des cas : si c’est vrai, cela ne démontre qu’une chose, c’est qu’il y a, en dépit du chantage à l’emploi, un nombre important de salariés (presque un sur deux) qui préfèrent s’évader de ce système où l’on est corvéable à merci, où l’on ne peut rien refuser à l’employeur ! Car un employeur qui choisit d’embaucher en Cne à la place d’un Cdi, il faut le désigner du doigt, il a tout pour rendre méfiant : c’est qu’il a l’intention de tirer le maximum du salarié, sans vouloir s’embarrasser de respecter ses droits ! Le Cne, c’est une invention perverse qui va chercher les moins bonnes intentions d’un petit employeur puisque l’argument de « vente » de ce maudit contrat, c’est « n’hésite pas à l’embaucher puisque tu pourras le virer sans problème ». Quand vous n’avez pas de droit face à un licenciement « abusif », et sans « cause réelle et sérieuse », en fait, chacun le comprend, vous n’avez plus de droit du tout, en amont, vous ne pouvez plus réclamer le paiement de vos heures supplémentaires (des milliards d’heures supplémentaires sont impayées, volées aux salariés, volées aux caisses de protection sociale) car si vous le faites, on vous vire ! Et c’est pareil pour vos conditions de travail, l’hygiène la sécurité, ainsi de suite, précarisés vous êtes !

Renaud Dutreil osait affirmer avant que Sarkozy ne le fasse, que ceux qui combattent le Cne (dont ils proposent qu’il soit « étendu en 2007 »... si la droite gagne) relèvent du « Jurassic Park à la française ». Il y a toujours eu des gens de droite comme lui, pour rêver d’en revenir avant l’abolition des privilèges, avant la Révolution Française, avant la Commune, avant le Front populaire, avant la Libération, avant Mai 68, avant l’inspection du travail, avant le droit syndical, avant le droit élémentaire du travail, c’est ce qu’ils appellent à contrario « la France d’après ».

Mais ces réactionnaires passéistes ont pourtant été battus par des millions de salariés, de manifestants, par toute la jeunesse, par plus de 80 % de l’opinion, au printemps 2006 ! Ca ne fait rien : ils s’obstinent, ils osent essayer de ranimer un « débat » dans les médias pour leur misérable contrat : ne laissons par Sarkozy plastronner au cours de cette campagne électorale, sur le cne, c’est un point central de sa politique de destruction du Code du travail selon les plans du Medef, de Mme Parisot - qui ne manque pas d’air.

Gérard Filoche

26 janvier 2007


Format imprimable

Format imprimable