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Les SDF existent à Caen.

Comme ailleurs il faut que les pouvoirs publics utilisent la loi de réquisition des logement vides

 

Cet article est dédié au "French Crétin" qui étale avec sa suffisance habituelle son incapacité à comprendre ce qui se passe dans notre société.

Le parisien : "Pensez-vous qu’il y aura, grâce à cette action, moins de sans-abri l’hiver prochain ?

Bernard Kouchner : Je ne le crois pas. Je connais bien les SDF et c’est une problématique bien différente de la pauvreté. Divorce, perte d’emploi, dérive psychologique... le parcours qui mène à la rue n’a rien à voir avec la crise du logement ou les inégalités sociales profondes. On n’a jamais autant construit de logement qu’actuellement, et pourtant il y a de nombreux sans-abri. Combien "pensent comme lui ?

A la différence de Paris nous ne connaissons pas sur Caen une concentration de SDF ce d’autant plus que « Médecins du Monde » (puis plus récemment « les enfants de Don Quichotte ») n’a pas ici distribué des tentes qui rendent ces personnes visibles. Ceux qu’on remarquent ce sont ceux qui sont bien visibles en ville soit une ou deux dizaines, qui « font peur » au passants.

Un certain nombre d’indicateurs montrent que le problème existe aussi ici : la fréquentation de la Boussole, des accueils de jour et de nuit, des foyers d’urgence, le système des réinsertion est saturé faute de sorties et les services sociaux sont détournés de leurs missions initiale pour répondre aux difficultés de logement.

Il est difficile de chiffrer la cohabitation plus ou moins occasionnelle de SDF chez des amis ou de la famille. La cohabitation plus durable ne rentre pas dans la catégorie des SDF mais peut revêtir un caractère d’urgence et dramatique aussi important.

Un chiffre est parlant car il traduit une augmentation très sensible : en 2004 le département du Calvados a financé 61000 nuités d’hôtel dans le cadre de l’accueil d’urgence soit 167 par nuit ; en 2005 ce chiffre augmente de 20% en passant à 73000 nuités soit 200 par nuit. [1]

Compte tenu de toutes ces données le nombres des SDF sur l’agglomération doit se situer à plus d’une centaine de personnes de manière permanente ce qui reste inférieur au chiffre obtenu (170) en appliquant le pourcentage de l’agglomération de Caen au recensement national des SDF (86500 d’après l’INSEE en 2001).

Nous ne disposons pas de chiffre sur les SDF travailleurs pauvres mais leur nombre ne doit pas être inférieur à leur pourcentage national (1/3) compte tenu du niveau des salaires dans la région et de l’augmentation des loyers qui rattrape le niveau national.

Pourtant aucune administration ou collectivité locale ne semble se préoccuper du problème global du mal logement dont les SDF ne sont que le bout de la chaîne : c’est faute de logement social que les dispositifs de réinsertion ne peuvent les prendre en charge faute de sorties du dispositif en nombre suffisant.

Pour traiter au fond le problème des SDF et des mal logés en général, il faut d’abord analyser ce qui produit ces situations.

La mairie de Caen a longtemps nié qu’il existait un problème de logement social, elle ne veut toujours pas prendre en compte la gravité des problèmes. Une première pétition citoyenne a pourtant montré que pour nos concitoyens c’est un problème d’importance.

Quant à la préfecture et aux services de l’Etat concernés quel silence !

Pensant que la gauche devait être plus sensible au sort des classes populaires qui subissent le plus fortement la crise actuelle du logement j’avais adressé voici plus d’un an Lettre au Président de région sur le logement social une lettre au président du conseil régional pour lui demander de saisir le Conseil économique et social régional « pour un rapport sur le mal logement et la situation du logement social sur la région ».

Cette demande est restée sans réponse de la part de la région de gauche qui préfère s’intéresser au cheval ou limiter son investigation au seul logement étudiant.

L’urgence est telle sur le mal logement que les mesures de fond ne suffisent pas. Bien sur il faut construire du logement social mais surtout du logement social accessible aux plus pauvres (aujourd’hui le logement social qui se développe le plus est celui qui ne l’est pas cf rapport de la fondation Abbé Pierre p 99 : sur 2000- 2005 les logement les moins chers ont augmentés de 50% les plus chers de près 500% ).

Mais pour cela il faut mener un certain nombre d’action structurelle sur le foncier, appliquer les obligations de la loi SRU, mettre en chantier des centaines de logement sociaux et ceci prend du temps. Et l’urgence sociale implique de répondre vite.

Les aides au logement dont par exemple le bouclier logement ne peuvent apporter une solution que dans le cas où l’offre de logement repart.

Un outil utilisable rapidement reste à la disposition des pouvoirs publics depuis sa mise en place à la Libération : c’est la réquisition des logement vides.site du DAL

A Caen près de 300 logements sont vides depuis 5 ans puisqu’il sont soumis désormais à la taxe d’habitation, c’est du moins l’estimation fournie par la mairie. Mais la réquisition doit s’étendre aux locaux commerciaux vides qui sont dans un certain nombre de cas parfaitement utilisables comme logements.

Une pétition sur la réquisition est en cours de signature : si, comme nous le souhaitons, elle est signée massivement nous créerons une nouvelle situation qui contraindra le préfet à prendre ces mesures de réquisitions.

Mais peut être faudra t’il occuper des logements vides ou des locaux commerciaux abandonnés pour faire bouger les choses ? L’état de nécessité face aux conséquences du manque de logement rendrait ces occupations légitimes sinon légales. Si c’est un moyen de faire sortir les pouvoirs public de leur apathie, il ne faut pas hésiter.

Le recours à la réquisition change complètement le marché du logement, elle modifie les données de ce marché aujourd’hui dérégulé, elle contraint les pouvoirs publics à accélérer les mesures de fond.

A terme l’usage de cette mesure de contrainte au nom de l’intérêt public conduit à rendre moins attrayante la spéculation foncière et donc à faciliter la construction de logements sociaux.

Au moment où l’on parle de droit opposable, se priver d’un tel outil n’est ce pas rendre ce droit opposable aussi limité que le droit à l’emploi ?

3 janvier 2007

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Notes :

[1] Ce chiffre doit être interprété avec prudence car le nombre de SDF ainsi accueillis doit être majoré quand il s’agit de familles (plusieures personnes pour une même nuitée) et minoré car le relogement en urgence se limite rarement à une seule nuit. les différences saisonnières viennent aussi compliquer une approche chiffrée : accueil en camping l’été, les hôtels retrouvant pendant la saison leur fonction d’accueil de touristes ou des saisonniers.


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