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Pour une anti candidature à l’élection présidentielle de 2012.

Voilà un texte qui va dans le sens de ce que nous avons discuté à la FASE sur la nécéssité de mener un autre type de campagne.

Accord aussi sur la question de la constituante et pourquoi pas sur les Etats généraux.

Voir sur le site de la FASE : une camapagne pour les présidentielles...http://lafederation.org/index.php?o...

 

mardi 30 août 2011

La proposition d’une anti candidature a de quoi surprendre au moment où, de la droite la plus extrême à la gauche la plus radicale, chacun affute ses armes et, avec la servile complicité des médias télévisuels, fait assaut de bons mots, de critiques et de formules lapidaires. On parle peu de programmes. Personne n’en a réellement un d’original qui puisse mettre en éveil la conscience du citoyen tant les contraintes du système économique, financier et social imposent un resserrement des propositions et un étouffement de la pensée politique.

Il semble qu’il n’y ait qu’un un seul enjeu réel : gagner la plus grande part possible d’un marché électoral qui, si l’on en juge par la participation aux dernières consultations, est en train de se réduire. De moins en moins de personnes croient au sauveur suprême. Se présenter comme une « force tranquille » avait permis, il y a trente ans, de faire élire un président du changement qui n’a fait que conforter un système. Un « candidat normal » pourrait aujourd’hui rafler la mise en renvoyant tous les autres à leurs inconséquences, tares et pathologies. Quelle misère politique ! Quel affaiblissement du débat public et quelle dégénérescence de la démocratie ?

Et pourtant, ici en France, ailleurs en Europe et dans le Monde, grandissent le besoin et la volonté de s’emparer des questions de société, de se projeter dans un autre avenir, de construire de nouvelles figures de l’homme et des rapports collectifs. Commençons chez nous. Les prochaines échéances électorales nous en offrent les possibilités comme le furent les Cahiers de Doléances et les Etats Généraux de 1789.

Que doit donc proposer et défendre une anti candidature présidentielle pour 2012 ? Elle ne doit pas revendiquer le pouvoir présidentiel avec toutes les compétences législatives, réglementaires et régaliennes qui sont aujourd’hui les siennes.

C’est donc une candidature totalement anormale, c’est-à-dire hors norme. Elle doit s’attacher à reconstruire la puissance démocratique d’agir d’un peuple qui en a été dépossédée au profit d’oligarchies de toutes natures, qui a été trop souvent trompé et de toute façon jamais entendu. Il s’agit enfin de passer du « pouvoir sur » qui est domination, au « pouvoir de » qui est émancipation.

Ne plus rentrer dans la normalité qu’imposent nos institutions contraintes par un réalisme économique qu’on nous dit incontournable (par exemple réduire la dette, sauver l’Europe et l’Euro, maintenir la compétitivité des entreprises...). Il faut, au contraire, rendre aux citoyens leur souveraineté normative qui consiste à faire la loi et à dire le droit.

Quel serait le « programme » - si toutefois on peut encore utiliser ce terme - de cette anti présidence et des forces vives qui se reconnaitraient dans son projet ? La réponse est simple même si la mise en œuvre l’est moins et demanderait un travail d’organisation et de mobilisation des structures que se sont données les citoyens : associations, collectifs d’habitants, syndicats, mouvements sociaux, entreprises d’économie sociale et solidaire... Il s’agirait d’organiser des Etats Généraux de la transformation sociale et politique alimentés par des cahiers de doléances, de propositions et de revendications élaborés contradictoirement et après débat par des habitants là où ils vivent, travaillent, luttent, étudient, et rendre ainsi à ceux qui en ont été dépossédé les compétences à s’exprimer, analyser, délibérer et arbitrer.

Ces Etats Généraux déboucheraient sur une assemblée constituante, une nouvelle déclaration des droits fondamentaux, une organisation de l’Etat et de ses services répondant aux besoins des citoyens et contrôlant les pouvoirs économiques, financiers et de production. Il faut en effet reprendre les choses par un autre bout si l’on veut rendre aux citoyens leur puissance souveraine et démocratique d’agir. Cela commence par la mise en place d’un grand service d’éducation populaire et permanente qui rassemblerait ce qui, actuellement, a noms d’Education Nationale, de Ministère de la Culture, de Secrétariat à la Jeunesse, aux Sports et à la Vie Associative. Car c’est là, d’une manière plurielle, contradictoire et si nécessaire conflictuelle, que peut se former et se forger une intelligence collective et politique à la dimension des enjeux de notre temps.

Car, en effet, cette anti candidature présidentielle est dictée par quelques raisons et enjeux de taille qui indiquent l’urgente nécessité d’agir et de faire de la politique autrement :

Une crise économique, sociale et écologique qui impose que les citoyens ne délèguent plus leurs pouvoirs mais reprennent leur destin en main.

Un redéploiement des inégalités qui précarise honteusement plusieurs millions de personnes et menace gravement le corps social et politique.

Une démocratie délégataire et un Etat social à bout de souffle, dans lesquels de nombreux citoyens ne se reconnaissent plus et qui les abandonne chaque jour un peu plus à leur triste sort.

N’attendons pas plus longtemps. Il sera bientôt trop tard. Prenons nos responsabilités. Sinon nous risquons la violence destructrice et la barbarie. L’histoire dramatique du dernier siècle doit nous servir de leçon.

Christian Maurel. Sociologue, cofondateur du collectif national « Education populaire et transformation sociale ». Dernier ouvrage paru : Education populaire et puissance d’agir. Les processus culturels de l’émancipation. Paris, L’Harmattan, 2010.

9 septembre 2011


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