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Quel développement ? pour quoi faire ?

Interventions à l’atelier organisé par le PCF à Blainville le 20 octobre 2009

 

Nous concevons ces ateliers comme des moments de débats entre forces politiques, organisations syndicales, associations, permettant l’intervention citoyenne la plus large (extrait de la lettre d’invitation du PCF)

Première intervention sur la fiscalité régionale : les aides comme enjeu du changement

Un référendum contre l’Etat-Sarkozy

En réponse à la question, je pense qu’il est urgent de faire de la réforme des collectivités locales prévue par Sarkozy une enjeu de mobilisation. Se trouvent posés, par delà les arguments soi-disant techniques, les enjeux en matière de démocratie. Cette « réforme » est un renforcement des pouvoirs centraux dominés par le fonctionnement obscur et lobbyiste au détriment de la transparence que devrait offrir, bien plus qu’aujourd’hui, la démocratie de proximité.

Mais c’est aussi une réforme qui vise à priver les collectivités locales d’une partie de leurs ressources, par la suppression de la taxe professionnelle par exemple, et donc en dernier ressort à affaiblir les possibilités d’investissements publics au moment même où la crise appelle un renforcement de cette intervention publique.

Je crois qu’il faudrait faire des régionales une consultation du peuple sur ces questions.

Mais la fiscalité, côté recettes, ne donne pas de grandes marges de manœuvre aux régions puisque les recettes fiscales des régions sont fixées par la loi.

La discussion est donc naturellement venue assez vite sur la question des aides aux entreprises.

Chantage patronal et aides

Sans vouloir revenir sur la gestion passée, il nous faut prendre la mesure de ce que nous impose la crise et ouvrir le débat avec les forces sociales, les associations, les citoyennes et les citoyens sur les conditions, les critères des aides aux entreprises.

Nous devons proposer de rompre radicalement avec un système bien trop répandu (et certains en ont donné des exemples criants ici) des aides comme réponse au chantage à l’emploi exercé sur les collectivités par les grandes entreprises.

Il ne s’agit pas seulement de contrôler les aides mais de définir des critères d’utilité sociale en fonction de ce que nous souhaitons collectivement pour le développement économique.

Quelle industrie voulons nous ?

Allons nous continuer à subventionner un agro-bussiness qui produit dans notre région des dizaines et des dizaines de milliers de « camemberts »/jour pour les exporter hors de la région en pratiquant, et la grève du lait vient nous le rappeler, une pression insupportable sur ses « sous-traitants » producteurs de lait ?

Allons nous continuer à fermer les yeux sur les conséquences sociales (baisse du nombre de fermes, mais aussi de tout ce qui accompagne le paysan en termes d’emplois dans les campagnes), et sur les conséquences écologiques au motif que ces compagnies emploient des ouvriers ? Ceux-ci bien souvent mal rémunérés et en nombre lui-même en baisse du fait de la concentration des firmes.

Je sais que cela fait débat entre nous, mais ne vaudrait-il pas mieux subventionner le secteur de l’économie d’énergie qui, le rapport des « Sept Vents du Cotentin  » l’a montré, peut créer des milliers d’emplois et d’emplois de meilleure qualité pour les salariés. Cette qualité des emplois est aussi un critère d’aide qu’il faudrait privilégier.


Deuxième intervention sur quel type de développement et quelle intervention des collectivités

Nous avons répondu positivement à l’invitation du PCF parce qu’il nous semble important de saisir toutes les occasions pour débattre d’une alternative.

Nous savons tous que l’absence d’une alternative politique, à la fois comme projet de société et comme action différente au niveau politique, pèse très lourd sur les mobilisations.

Nous voulons battre la droite

Et ceci au moment où la crise frappe très durement celles et ceux que le libéralisme économique exclue, mais aussi transforme aussi très profondément l’ensemble des rapports sociaux, le vivre ensemble pour rendre ce dernier de plus en plus difficile : il est indispensable de mettre un terme à cette dégradation, le temps joue contre nous.

Pour battre la droite il ne faut pas seulement proposer des « gestions sociales plus performantes » mais mettre en cause radicalement cette société et proposer d’aller vers un autre monde.

Bien sûr pour ce faire il est nécessaire d’être sur tous les terrains de la lutte idéologiques contre le capitalisme, mais il faut aussi être dans l’intervention politique immédiate et sur ce terrain là aussi nous avons besoin de propositions en rupture.

Cette idée là, de rupture, a fait ne l’oublions pas le succès de Sarkozy, parce que face à sa rupture contre révolutionnaire, réactionnaire la gauche n’a paru opposer qu’une espèce de continuité raisonnable.

Rupture, vous avez dit rupture ?

L’heure est donc aujourd’hui à avancer dans le débat public, dans les urnes et dans la rue, des propositions politiques qui rompent avec le passé de la gauche.

Je ne suis pas partisan de la thèse des 2 gauches, je pense qu’il y en a bien plus ( socialiste, communiste, altermondialiste...), que la diversité devrait être une force face au « je ne veux voir qu’une seule tête » de la droite.

Néanmoins, au sein de ces gauches diverses, divisées nous voyons se dessiner aujourd’hui des différences fortes entre ceux qui écoutent trop la « raison libérale  », veulent gérer les système, et l’accompagner socialement ce qui devient de plus en plus difficile, et ceux qui pensent que le temps d’une alternative nous est imposé par la situation économique (la crise qui a révélé l’incapacité du néolibéralisme à répondre aux besoins), par la crise politique (contester radicalement le fonctionnement de plus en plus antidémocratique et autoritaire de l’Etat) et par les aspirations issues des mouvements sociaux ( plus de droits, respect de la planète ...).

Le PS et Nous Tous

Quand on regarde les discours, le programme du parti socialiste et ce que nous avançons, les différences sautent aux yeux.

Le parti socialiste, au nom d’un réalisme de gestion, ne remet pas en cause la logique libérale du capital.

Cette différence existe aussi dans les actes quotidiens de gestion : dans le débat de tout à l’heure sur les aides aux entreprises, quelle différence d’approche entre nous et eux !

En particulier je veux dire mon accord avec ceux qui ont souligné ici leur incompréhension des aides données à ceux qui virent leurs intérimaires et se préparent à supprimer encore des emplois.

Je voudrais aller plus loin et m’interroger sur la politique d’aide au secteur de l’automobile -particulièrement important dans notre région- qui se fonde sur la même analyse que celle avancée par les patrons : des sous pour tenir le coup en attendant la reprise ! Aucune réflexion sur ce qui se prépare dans ce secteur, sur l’avenir même de ce secteur et sur la politique des firmes !

Ces critiques ne nous empêchent pas de dire que la priorité est à battre la droite à mettre un coup d’arrêt à la politique de Sarkozy et d’empêcher ici la droite de reprendre la région.

Ce ne pourra se faire que si nous sommes capables de mobiliser celles et ceux qui sont aujourd’hui distants de la politique.

Je ne parle même pas de mobiliser massivement les plus précaires, pauvres et chômeurs qui sont écrasés par la survie au quotidien, c’est pour ceux-là qu’il faudra agir vite et leur donner les moyens de redevenir acteurs de leur vie et acteurs de la vie politique.

Mais, tout de suite, si nous ne sommes pas capable de redonner un espoir de changement aux découragé(e)s) d’hier, qui n’ont pas supporté la division des dernières échéances politiques et se sont réfugiés dans l’abstention, alors la droite a de beaux jours devant elle !

Pour celles- là, pour ceux -là il ne faut pas proposer un simple changement de têtes, un changement mou, tiède mais le premier pas vers une alternative réelle et non une simple alternance.

Un projet de société qui se construit dans les luttes

Il nous faut dès maintenant construire (commencer au moins) un projet, une perspective de long terme.

Sur la question de l’industrie, il ne suffit pas de dire « maintien de l’emploi » (et n’importe quel emploi) quand les multinationales prennent des décisions qui semblent hors de portée du citoyen lambda.

Il faut certes le dire, poser des exigences aux groupes qui restructurent ... mais nous avons besoin, en plus, d’une perspective globale sur la « souveraineté industrielle » du même type que celle que la Confédération Paysanne et Via Campésina offrent quand elles avancent la souveraineté alimentaire. Nous devons ouvrir le débat sur quoi et comment produire

Il nous faut réaffirmer qu’il faut maintenir, relocaliser des productions industrielles à l’opposé de la logique du tout « export-import » célébrée par les chantres de la mondialisation.

Les contraintes écologiques vont nous obliger à penser, estimer autrement les coûts de transport dans le sens des circuits courts de la proximité : il serait temps de mettre en cause un mode d’échange fondé sur la grande distribution qui conduit à la pollution par les transports et à la délocalisation pour gagner plus.

Il faut construire une perspective de relocalisation à partir des besoins et non du développement de la marchandisation.

Ce que nous voyons se dessiner aujourd’hui c’est un retour d’intérêt pour la valeur d’usage par rapport à la valeur d’échange capitaliste. De plus en plus nombreux sont ceux qui se posent la question de l’utilité sociale de tel ou tel produit de telle ou telle activité économique. C’est de ces aspirations qu’il faut partir pour dessiner une alternative qui peut se concrétiser dans les politiques de transports, de développement économique qui ne doit pas rester le privilège des patrons, des formations, de la recherche...

Tout ceci repose des questions centrales et transversales : Celle de la nécessité d’une démocratie plus importante pour permettre de substituer les choix collectifs aux décisions prises dans le seul intérêt des plus riches. Celle aussi d’un autre partage des richesses.

13 novembre 2009


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