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Contre Sarkozy

Vous avez le droit de faire littérature ancienne, mais le contribuable n’a pas forcément à payer vos études

Ainsi donc au moment même où il se déclare favorable à une extension de la liberté tarifaire qui permet à certains médecins de se rembourser les études que les contribuables leur ont payés, Sarkozy remet en cause le Financement public de certains secteurs de la culture et du savoir.

Sous couvert de lutte contre le chômage des jeunes, Sarkozy prétend planifier l’enseignement à partir des besoins d’emplois (définis par qui ? à quel terme ?). Pour obtenir des éléments de réponses il suffit de regarder quels sont les secteurs en question : l’informatique où déjà les conditions d’emploi sont extrêmement dégradés au point que certains jeunes informaticiens ont le sentiment d’être, malgré leur qualification, "au bas de l’échelle" ( cf Pierre Cours-Salies et autres " le bas de l’échelle").

Dans les sciences humaines seule l’économie, trouve grâce aux yeux du prince... on comprend pourquoi quand l’économie se réduit de plus en plus à l’élaboration d’une vision libérale du monde (voir les pétitions des étudiants et enseignants en économie).

Quant aux mathématiques c’est pour leur fonction de sélection sociale qu’elles emporte le financement du candidat des élites.

Le reste est soumis à la portion congrue : voilà qui vient conforter les inquiétudes de "sauvons la recherche".

Ce n’est pas étonnant de la part d’un homme qui s’est vu critiqué par la quasi totalité de la communauté scientifique sur ses projets de contrôle des enfants de 3 ans et ses discours sur l’eugénisme social ! Voilà aussi une vrai rupture : le président mènera désormais une guerre à l’intelligence qui n’est pas contrôlée.

 

Communiqué de la Maison des écrivains

Dans le journal gratuit 20 minutes du 16 avril, figure une interview de Nicolas Sarkozy. Entre autres sujets, il y parle de l’université et prend pour exemple de filière inutile, et qui ne devrait plus être prise en charge par les fonds publics, l’enseignement de la "littérature ancienne" :

Vous vous fixez comme objectif de ne laisser aucun enfant sortir du système scolaire sans qualifications. Comment comptez-vous parvenir à cet objectif ?

-  Par exemple dans les universités, chacun choisira sa filière, mais l’Etat n’est pas obligé de financer les filières qui conduisent au chômage. L’Etat financera davantage de places dans les filières qui proposent des emplois, que dans des filières où on a 5000 étudiants pour 250 places.

Si je veux faire littérature ancienne, je devrais financer mes études ?

-  Vous avez le droit de faire littérature ancienne, mais le contribuable n’a pas forcément à payer vos études de littérature ancienne si au bout il y a 1000 étudiants pour deux places. Les universités auront davantage d’argent pour créer des filières dans l’informatique, dans les mathématiques, dans les sciences économiques. Le plaisir de la connaissance est formidable mais l’Etat doit se préoccuper d’abord de la réussite professionnelle des jeunes.

Ne prenons pas à la légère ces déclarations du candidat de l’UMP. Pour lui, l’Etat n’a pas à assumer le prix de la culture.

Son jugement sur le « plaisir de la connaissance », opposé à l’utilité ou à la rentabilité érigées en principe politique, manifeste une ignorance et un mépris dangereux qui menacent le socle de toute société démocratique. Il avertit les artistes et les penseurs, nous écrivains, en particulier, du sort qu’il réserve à la culture, la littérature au premier chef, et à leur transmission par l’Education nationale

Tous les chefs d’Etat, jusqu’ici : Charles de Gaulle, Georges Pompidou, François Mitterrand comme Jacques Chirac ont, chacun à leur manière [1], exprimé leur attachement à l’héritage intellectuel et artistique qui fonde l’identité française. Ils ont écrit, se sont revendiqués de la poésie, du roman, de l’art.

Dans le contexte déjà alarmant que dénonce notre Appel Filières littéraires, une mort annoncée ?, la gravité de cette déclaration ne peut nous laisser d’illusions. Elle engage la communauté littéraire et éducative à se mobiliser.

Voir le site de la Maison des écrivains.

[1] -> notons qu’Eric Gross, directeur du livre sous Raffarin, puis conseiller culturel de Villepin, vient d’être nommé ce 3 avril inspecteur général de l’Education nationale, c’est cela sans doute l’attachement intellectuel et artistique ? - note de François Bon _ 27 avril 2007

30 avril 2007

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Notes :

[1] notons qu’Eric Gross, directeur du livre sous Raffarin, puis conseiller culturel de Villepin, vient d’être nommé ce 3 avril inspecteur général de l’Education nationale, c’est cela sans doute l’attachement intellectuel et artistique ? - note de François Bon _ 27 avril 2007


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