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Intervention sur le rapport des représentants dans les HLM
Conseil municipal du 19 janvier 2004

19 janvier 2004

par Etienne Adam



Adresse de l'article : http://anpag.org/article.php3?id_article=25



Comme l’année dernière, je vais à nouveau intervenir sur le logement social, sujet qui me semble de première importance.

L’an dernier, j’avais déjà évoqué la croissance de la demande de logement social, liée à la paupérisation. Demande qui reste sans réponse satisfaisante, et c’est ce qui m’a mené à voter contre le projet de Presqu’île faute de logement social, et contre le plan d’action foncière qui n’en faisait pas la priorité de la politique foncière ainsi que sur le PLH.

Pour me répondre l’an dernier, M. Bovalis me disait « il n’y a pas la tension que vous pouvez imaginer dans le domaine du logement privé bon marché ou du logement social dans son ensemble »

Même « réponse dans Caen magazine de ce mois dans un article intitulé « une nouvelle dynamique de construction » où les 746 logements construits ou en cours de construction « confirment une rôle essentiel de la ville dans la régulation du marché »

Je ne partage pas du tout l’optimisme de l’adjoint au logement, ni celui des rédacteurs de l’article.

Aujourd’hui 22 des quelques 50 000 logements de Caen sont des logements sociaux. Mais si on fait le total des constructions de HLM, on découvre que dans la nouvelle dynamique de 700 logements seuls 15 % sont des logements sociaux (et encore, si on considère que ceux de Beaulieu et de la Cité Gardin restent encore des logements sociaux destinés à ceux qui n’ont pas de ressources).

Cette baisse du pourcentage des logements sociaux est-elle la conséquence d’un choix délibéré au niveau local ou l’effet de l’action, ou plutôt de l’inaction, de votre gouvernement dans la politique du logement social malgré les effets d’annonce de Borloo et De Robien ?

En tout cas, c’est grave pour l’avenir immédiat de milliers de personnes qui veulent se loger dans des conditions décentes.

Ce n’est pas une spécificité caennaise, l’insuffisance du logement social, il suffit de lire les rapports de la Fondation Abbé Pierre pour s’en convaincre.

Mais je crains que d’ici à la fin de notre mandat, M. Bovalis ne puisse plus me remercier de reconnaître « la bonne occupation sociale de Caen Habitat », parce que la place du logement social sur Caen se sera dégradée.

M. l’adjoint au logement, vous m’avez dit l’année dernière « pouvoir répondre à toutes les demandes » mais comment expliquez-vous la croissance des demandes en stock dans l’organisme que vous présidez ?

Nous sommes passés de 3191 demandes en 2000 à 4464 en 2002 soit une croissance de 40% !

Et toutes les demandes sont satisfaites !

Sur le marché privé, je n’imagine pas une tension, elle est là : les prix de l’immobilier flambent et nous rattrapons notre retard par rapport à la moyenne nationale dans ce domaine, ce qui n’est pas à mon sens un progrès.

La location d’un studio sur Caen est en moyenne de 300€ soit les 2/3 du montant de l’ASS ou du RMI. Je sais, vous me direz qu’il existe des aides au logement mais sur une telle location un RMIste ne touchera que 230 euros d’aide au logement ce qui lui laisse 70 euros de sa poche plus les charges : autant dire qu’il ne lui est pas possible de louer.

Et pourtant la demande de logements pas chers est bien là !

J’avais évoqué l’an dernier la pauvreté et la précarité des jeunes, ces deux prochaines années nous aurons un phénomène d’appauvrissement encore plus massif. Je vous l’ai dit en décembre, il faut se préparer à gérer les conséquences de l’exclusion de milliers de personnes du système d’indemnisation du chômage (14000 « recalculés » c’est-à-dire exclus par l’ASSEDIC, d’autres privés d’ASS, un développement du RMI).

Quand on sait que les sans-emplois représentent déjà 40% des occupants des logements HLM, nous avons de quoi penser que nous n’allons pas couvrir les besoins surtout si on rajoute les emplois précaires qui font des salariés pauvres.

Une donnée manque dans les statistiques, c’est le temps partiel : sur les 2000 familles monoparentales, combien sont dans ce cas, et là encore nous avons affaire à des salariés pauvres en difficulté pour assumer un logement. Il y a des besoins énormes pour mettre fin à ce « mal logement ». Le logement, nous le savons tous, est une condition essentielle à l’insertion y compris professionnelle : sans logement pas de contrat de travail, les employeurs demandent une adresse. Je reviens sur les expulsions : par rapport à l’an dernier, + 30% de demandes auprès de la force publique, + 100% d’expulsions réalisées. Quelles sont les raisons de cette augmentation ? Je ne mets pas en doute l’action des accompagnateurs sociaux mais s’il n’y a pas de revenus que peuvent-ils faire ? Je crains que demain ce soit encore pire et que nous ayons un nombre croissant d’expulsions pour pauvreté. En conclusion, une suggestion : pourquoi ne pas mettre en place à côté ou autour de l’observatoire, une commission extra-municipale sur les besoins de logements et de logements sociaux. Je suis sûr que les associations familiales et de locataires seraient disponibles, nous pourrions aussi solliciter les travailleurs sociaux de secteur et spécialisés - je pense en particulier au CROUS qui pourrait apporter sur la pauvreté étudiante.

Ensemble, nous pourrions réfléchir sur une stratégie pour sortir du mal logement.

Etienne Adam
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