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Contribuer à la défaite de Sarkozy en ouvrant des perspectives d’avenir.

27 avril 2007

par Etienne Adam



Adresse de l'article : http://anpag.org/article.php3?id_article=457



Les résultats du premier tour nous ont assommés. Bien sûr nous avions senti venir le vote utile mais la déconvenue n’en est pas moins réelle.

Pourquoi le vote utile ?

Le faible score de notre candidature collective ne saurait être réduit à telle ou telle erreur de campagne.

Une partie de celles et ceux qui avaient témoigné de la sympathie se sont réfugiés dans le vote dit « utile ». Bien sûr ils ont été victimes de manœuvres qui visaient à créer entretenir la peur d’un nouveau 21 avril pourtant bien improbable.

Nous avons été dans une certaine mesure "désavoués" par une partie des nôtres dans une démarche qui visait à changer le rapport à la politique et à sortir de la délégation aux élus et aux organisations.

Et ceci au profit d’une conception utilitariste du vite complètement enfermée dans le système politique actuel : nous avons sur-estimé l’ampleur de la crise politique et pensé que les électeurs étaient beaucoup plus émancipés du système politique et médiatique.

La campagne de José, décalée par rapport aux besoins médiatiques (à Caen et Rouen nous avons privilégié le contact avec les militants, les sympathisants par rapport au point de presse) nous a desservi mais maintenu le cap sur nos options de fond.

Je crois qu’il a manqué dans notre démarche une vision stratégique qui soit lisible par les gens : à quoi sert maintenant la gauche que nous incarnons ?

Entre la simple dénonciation, fond de commerce de l’existence d’un petit appareil, et la soumission au réalisme politique économique et social libéral comment peut on faire de la politique autrement pour modifier les conditions d’existence de ceux qui vivent ici ?

Par ailleurs la dimension "politique autrement", la volonté de capter les aspirations au bouleversement de la scène politique nous a échappé pour être capitalisé par Bayrou qui apparament rendait cette perspective immédiatement possible. Nous n’avons pas servi à sortir du bipartisme, c’est Bayrou qui a servi d’outil.

Tout ceci n’a pas bénéficié à la gauche dans sa totalité. Certes Olivier Besancenot a limité les dégâts mais en plumant la "volaille LO" ( près de moitié moins de voix en 2007/2002). Il n’y a pas de quoi crier victoire et faire des 4,08 % « un encouragement précieux pour les luttes de demain ». Mais la LCR est ainsi enfermée dans la fonction d’alibi démocratique d’un sytème bipartiste.

Renouveau ou recul démocratique

Le rouleau compresseur du vote utile n’a pas non plus profité au PS dont le score est à peine supérieur à celui de ses composantes divisées de 2002 ( 2 points de plus). Privé de réserves conséquentes à gauche, avec un total des voix de gauche réduit à un niveau particulièrement bas, le PS a des soucis à se faire pour le second tour.

Il risque de se croire complètement dépendant de Bayrou et de multiplier les ouvertures au centre c’est à dire de faire encore des concessions supplémentaires au libéralisme. A terme la gauche a ’t’elle à gagner à la mise en place d’une majorité politique de type « démocrate à l’étasunienne » comme nous le voyons aujourd’hui en Italie ?

Mais ce qui me semble le plus grave dans ce premier tour, c’est le recul du débat démocratique au sens de débat autour d’un programme et d’une conception de la société, au profit d’un comportement électoral largement dominé par l’utilitarisme dans le cadre des institutions actuelles.

Le vote Bayrou par exemple est largement un vote anti-système dans lequel les électeurs ont pensé subvertir le système et exprimer leur refus des élites installées. Il me semble abusif de dire que l’ensemble des votes Bayrou soient des votes de droite et l’intéressé le sent bien lui même.

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Sarkopire

Au bout du compte, ce qui est décrit par la presse comme un renouveau démocratique ne répond pas à la crise démocratique issue du fonctionnement de la Vème : paradoxalement ce scrutin marque un renforcement du bipartisme alors que la critique de ce bipartisme semblait jusqu’alors grandir.

Battre Saykozy

Pire ce « renouveau démocratique » risque de favoriser la victoire d’un candidat étranger à un certain nombre de valeurs républicaines et démocratiques. Les positions philosophiques de Sarkozy sont bien plus issues de la tradition fondamentaliste étasunienne que de toute autre origine.

La visite à Bush, la condamnation de la position française contre la guerre impériale US en Irak, le discours sur la génétique des comportements sont des révélateurs d’une conception du monde complètement différente de celle qui dominait la droite issue du gaullisme.

Cet homme est un danger parce qu’il incarne des tendances régressives à l’oeuvre dans notre société, pour un retour à un vision du monde datant de 2 siècles.

Il faut battre Sarkozy pour éviter le déchaînement de la « chasse aux pauvres » animées par une haine de classe appuyée sur les justifications pseudo scientifique de l’eugénisme social.

Il faut battre Sarkozy pour sauvegarder nos libertés fondamentales déjà bien mises à mal par 5 ans (et un peu plus) de lois liberticides.

il faut battre Sarkozy pour garder un minimum de société solidaire et de droits pour ceux qui travaillent (mais aussi pour ceux qui sont exclus du travail)

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Au second tour nous ferons tout ce que nous pourrons pour battre Sarkozy.

Battre la droite passe aussi par les législatives...

Qu’est il possible de faire ?

Je crois inutile de continuer les grandes déclarations proclamatoires en faveur de l’unité telles que les font certains encore aujourd’hui : nous avons entre les différentes composantes des différences stratégiques importantes qui sont devenues visibles par beaucoup.

Dire le contraire, continuer à survaloriser les convergences pour mieux nier les divergences, c’est favoriser le discours sur la gauche antilibérale la plus bête du monde, la rivalité d’égos ou de boutique comme seul facteur explicatif. En faisant cela, nous donnons de nous une image très politicienne.

Je crois qu’il faut assumer publiquement les difficultés et chercher les moyens de commencer à les résoudre.

Un accord électoral limité à un partage des circonscriptions sur la base des convergences qui permettent d’être dans le même camp mais qui respecte les différences en ne nous obligeant pas à assumer des accords politiques de facade serait déjà un grand progrès. Je crois que ce serait un signal fort compris par ceux qui nous regardent malgré tout avec sympathie.

Voilà la proposition minimale que nous devons faire au PCF, à la LCR mais peut être aussi localement aux Verts qui ont été ici particulièrement victime de la stratégie pro-PS de la direction nationale : un front électoral qui rassemble les antilibéraux dans toutes leurs composantes sociales, écologiques, féministe, altermondialiste et antiraciste.

Une alliance locale à plusieurs visage ce qui suppose : pas de parti dominant mais de la place pour tout le monde.

...et construire une nouvelle perspective politique

Et si cette perspective unitaire limitée ne se fait pas doit on maintenir nos candidatures aux législatives ?

Si l’on s’en tient aux scores électoraux, il vaudrait mieux aller à la pêche, expliquer que nous sommes tellement peu représentatifs que nous ne voulons pas jouer les accessoires au service du bipartisme.

Mais est-ce la seule dimension à prendre en compte ?

La campagne de proximité, les marques de sympathie, la participation à la campagne et aux réunions publiques tout cela doit il être considéré comme négligeable. ?

Dans la campagne collective autour de José a commencé à se construire des nouvelles formes d’interventions politiques.

Nous avons joué le jeu risqué de la candidature autonome parce que nous avions pensé que seule une candidature empêcherait la dissolution complète d’un réseau militant qui avait commencé à émerger dans les collectifs unitaires et l’appel de janvier. Malgré les déconvenues je crois que nous avons eu raison. Sauter l’échéance des présidentielles aurait été encore plus destructeur qu’un score décevant mais qui a permis un travail en commun, d’expérimenter des actions communes. Tout cela est pour l’unité beaucoup plus fondamental que les discours de principe.

Je suis donc pour des candidatures qui marquent notre permanence d’intervention dans le champ politique le plus classique, mais il faudra ouvrir d’autres champs comme donner donner une suite à l’intitiative citoyenne sur le logement et sur la ville (et ses rapports à la campagne) : je crois que nous avons là une piste qui articule mouvements sociaux associatifs et politique à creuser.

Bien sûr il faut continuer notre travail de militants dans les mouvements sociaux.

Ce serait bien d’apporter notre contribution à la défaite de Sarkozy en ouvrant des perspectives d’avenir.

Etienne Adam
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