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Fillon et Sarkozy ont parlé : deux bonnes raisons supplémentaires de boycotter le débat xénophobe

8 décembre 2009

par Etienne Adam



Adresse de l'article : http://anpag.org/article.php3?id_article=860



Nous avons d’abord eu cette même semaine le discours de Fillon chargé de « déminer  » le débat sur « l’identité nationale » à la place de son patron face au déchainements racistes du site du ministère de l’anti-immigration et aux déclarations des différents dirigeants de l’UDF qui laissaient transparaître une xénophobie bien franchouillarde. Puis la tribune ( ça fait chic !) de Sarkozy dans le Monde.

Il faut se rappeler le discours de Nicolas Sarkozy à à La Chapelle-en-Vercors, le jeudi 12 novembre avec ces affirmations comme « Depuis deux cents ans, à part l’expérience sanglante de la Terreur, nul totalitarisme n’a menacé nos libertés. C’est que la culture française est irréductible au totalitarisme » .

Ignorer, dans ce lieu, le régime de Vichy, ce n’est pas faire preuve d’une inculture historique, c’est occulter volontairement la collaboration dans la déportation des juifs, c’est occulter volontairement le caractère de l’Etat français.

Ces négations visent à introduire une notion de France éternelle idéalisée dans le cadre réaffirmé d’une tradition chrétienne.

Fillion chez Bébéar ; l’identité ou l’action française ?

Sous des dehors plus posés, c’est la même conception de l’identité nationale « Être français, c’est d’abord appartenir à un très vieux pays d’enracinement. » qui prévaut dans le discours de Fillion au colloque de l’institut Montaigne de Claude Bébéar [1]

C’est celle d’une « France des origines » et de « lignées anciennes ».

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Et d’appeler, lui aussi [2], à son secours Marc Bloch et la fameuse citation de l’étrange défaite que le droite n’arrête pas d’instrumentaliser en la sortant de son contexte et de l’itinéraire d’historien et de citoyen de Marc Bloch comme l’ont encore rappelé ce jours derniers dans un très beau texte « Laissez Marc Bloch tranquille, M. Sarkozy » Suzette Bloch et Nicolas Offenstadt.

Mais Fillon va chercher l’identité nationale dans Jacques Bainville, membre de l’action française de Maurras, qui n’a cessé de célébrer la france éternelle ...de nos rois. Et cette évocation de Bainvile n’est pas innocente « Bainville disait que ce qui était remarquable chez Jeanne d’ARC, ce n’était pas d’avoir délivré Orléans, mais d’avoir reconnu le dauphin et d’être tombée à genoux devant lui. Je crois effectivement que l’identité française se reconnaît à ce dialogue de l’orgueil et de l’abnégation ».

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Et Fillon de continuer dans la même ligne : « La France est laïque, mais la France est tout naturellement traversée par un vieil héritage chrétien qui ne saurait être ignoré par les autres religions installées plus récemment sur notre sol ».

Et francois Fillion de nous proposer une nouvelle devise républicaine :

L’humanisme. La tolérance. La liberté de conscience. La solidarité.

L’individu pris comme référence de toute justice.

L’Etat de droit, seul fondement légitime du pouvoir.

à méditer ! Liberté égalité Fraternité ne sont pas cités

Sarkozy l’homme du monde ?

Sans doute Nicolas Guaino ( à moins que ce ne soit Henri Sarkozy) a du se rendre compte qu’il ne pouvait plus se dérober.

Cette tribune au Monde paraît se situer en dehors de la hargne de l’UMP . Le Monde dans sa présentation insiste sur le recul pris par Sarkozy : « Le président de la République rappelle les valeurs de tolérance et d’ouverture de la France et appelle au respect mutuel entre "ceux qui arrivent" et "ceux qui accueillent  ».On ne peut qu’être attéré par cette présentation du journal le Monde !

Il y a certes de belles phrases sur le métissage et les respect : « le métissage ce n’est pas la négation des identités, c’est pour chacun, vis-à-vis de l’autre, la reconnaissance, la compréhension et le respect  ».

Je suis sur que les sans papiers apprécieront d’être ainsi respectés malgré les apparences trompeuses que sont les reconduites muclées, les détentions dans des conditions indignes, la chasse dans la rue et dans la jungle !

Mais aussitôt intervient le rappel à l’ordre : « Respecter ceux qui accueillent, c’est s’efforcer de ne pas les heurter, de ne pas les choquer  »

Le sens réel de cette phrase est donné par le début de la tribune avec l’apologie du vote suisse défendu contre ceux qui feraient montre d’un « mépris du peuple ».

Et pour mieux donner raison aux suisses racistes on convoque en renfort les partisans du NON à la constitution européenne de 2005 ! Sarkozy fait l’apologie et prend la défense de ceux, français , néerlandais et irlandais, qui ont voté non.

Et il profite pour nous dire que le traité de Lisbonne qu’il a soutenu et fait voter par le parlement et non par référendum, ce traité était celui d’une autre Europe celle qui a voté non ! Giscard va être content lui qui disait que c’était la même chose sous une autre présentation... et il n’est pas seul à le dire.

Mais ce peuple, que Sarkozy admire et que les immigrants doivent respecter, quel est il ?

Il est sur le modèle des suisses « pays qui a une longue tradition d’ouverture, d’hospitalité, de tolérance, ».

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Oublié que l’ouverture c’est celle aux émigrés fiscaux , aux capitaux et que les immigrés pauvres sont dans une proportion bien moindre que dans les autres pays d’Europe.

Oublié que l’hospitalité suisse ne fut pas de longue tradition vis à vis de ceux qui fuyaient les persécutions nazies ( que des suisses furent persécutés condamnés pour avoir accueillis ceux -ci)

Oublié que la tolérance conduit une bonne partie des suisses à se retrouver par leur vote dans un parti qui en plus d’interdire les minarets s’en prend à la "racaille frontalière française".

Peu importe ces faits, il faut faire foin de toute repentance et réhabiliter la supériorité de l’Europe sur les autre peuples !

«  Les peuples d’Europe sont accueillants, sont tolérants, c’est dans leur nature et dans leur culture. »écrit Sarkozy.

Oubliés les vagues meurtrières de xénophobie, oublié même la destruction des juifs d’Europe qui fait partie de notre culture et pas seulement de la responsabilité allemande. Oubliées les guerres coloniales et les massacres « d’indigènes » au nom de la culture et de la civilisation occidentale.

C’est ce peuple là, dont on ne veut pas voir la part d’ombre sanglante, qui doit être respecté et qui est flatté par un président qui rompt ainsi avec toute une tradition républicaine.

La Honte ?

C’est un recul sans précédent de ce qui a depuis la Libération fait consensus politique dans ce pays : ne pas assumer cette part d’ombre ( rappelez vous : , la France a été majoritairement résistante, aucun officier français ne torture en Algérie disait le discours officiel).

Plus qu’une repentance que personne ne demande, ce déni de ce que nous avons fait (ou du moins certains d’entre nous) cette idéalisation de «  l’occident  » malgré ses crimes, et situer de l’autre coté la barbarie ( dans le communisme hier, dans l’islamisme aujourd’hui) n’est pas un discours de respect de l’autre mais la construction d’une supériorité dont nous savons maintenant sur quoi elle peut déboucher.

Je ne peut que partager ce qu écrit Edwy Plenel dans Médiapart sous le titre « Une Honte nationale » http://www.mediapart.fr/journal/fra...

Et je vous invite une fois de plus à signer cet appel « Nous ne débattrons pas ! »

Signez !

http://www.mediapart.fr/journal/fra...

Etienne Adam


[1] Pour en savoir plus sur ce Think thank libéral voirhttp://www.institutmontaigne.org/po....

[2] comme la voix de son maître !

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