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Démantèlement de DEXIA :20 ans d’erreurs et d’aveuglement idéologique libéral...Qui doit payer ???
Communiqué de l’Union des syndicats CGT du groupe Caisse des dépôts sur DEXIA

14 octobre 2011

par Etienne Adam



Adresse de l'article : http://anpag.org/article.php3?id_article=1103

Il est utile de faire connaitre cette position des syndicats CGT qui pose les problèmes de fond du financement public.

Philippe Duron a été membre du conseil d’administration de DEXIA et quelle est sa position à ce sujet ? Quel est est son bilan comme adminsitrateur et son analyse de cette lente dérive de Dexia qui porte une responsabilité dans la diffusion de produits toxiques dans les collectivités locales et les hôpitaux ?



Après deux semaines de tractations, le conseil d’administration de DEXIA a entériné, lundi 10 octobre, les termes globaux de son démantèlement : partition de la holding DEXIA et rachat en forme de nationalisation de DEXIA Banque Belgique par le gouvernement belge ; cantonnement des actifs problématiques dans une «  bad bank » garantie à hauteur de 90 milliards par les 3 Etats (dont 36,5 % portés par la France) ; reprise du portefeuille et de l’activité de financement des collectivités locales dans le cadre de deux structures partenariales publiques réunissant la CDC et la Banque Postale : une structure « commerciale » dédiée au nouveau prêt, majoritairement détenue par la Poste ; une société de crédit foncier prenant en charge la gestion et la renégociation des 80 milliards l’encours de prêts aux collectivités locales, qui serait détenue à 65 % par la CDC.

En outre, le Parlement Français sera amené à se prononcer le 17 octobre prochain sur un projet de loi de finances rectificatif validant les garanties apportées par l’Etat français dans cette opération.

Si « intellectuellement », on ne peut que se satisfaire de la perspective d’un retour à une structure publique de financement des collectivités locales, qui préfigure partiellement le pôle public financier que nous revendiquons, on ne peut d’une part, passer par pertes et profits, le bilan cumulé de plus de 20 ans d’erreurs et d’autre part valider les termes d’un dispositif de financement qui sollicite essentiellement les fonds publics (Caisse des dépôts, Poste, Etat français donc contribuables..) sans jamais interpeller les banques et les marchés financiers.

20 ans d’erreurs et d’aveuglement idéologique, ça ne s’efface pas comme ça !

La presse, ces derniers jours, a rappelé la sinistre histoire de DEXIA-CLF : héritier d’une ancienne direction de la Caisse des dépôts et d’un établissement public administratif dédié au financement des collectivités locales, la CAECL, gérée par la CDC, c’est sous la férule de Pierre RICHARD , ancien Directeur adjoint de la CDC, et par décret signé par le Premier Ministre Edouard BALLADUR que fut privatisé le C.L.F le 17 juin 1993 ;

Hélas, seule la CGT Caisse des dépôts contesta cette privatisation en engageant vainement une procédure devant le conseil d’Etat(avec maître THIRIEZ) ; il ne sert à rien d’avoir raison, seul et trop tôt, mais au moins pourra-t-on faire grâce à la CGT, d’avoir contesté toutes les grandes étapes du piteux parcours de DEXIA, de la privatisation à la fusion avec le Crédit communal de Belgique en 1996, en passant par l’introduction en bourse, l’essai raté de création d’une banque directe (zebank) ou encore le projet d’accord avec Sanpaolo IMI, tout comme le rachat plus récent du « réhausseur » de crédit américain FSA.

Si quasiment toutes ces décisions sont à porter au débit de Pierre RICHARD, qui coule aujourd’hui une retraite tranquille à 600 000 euros par an, si elles furent quasiment toutes appuyées ou initiées par des gouvernements ou des majorités de droite (1987 ; 1993 ; 1996...), force est de constater qu’elles ne furent pas remises en cause par des majorités ou des gouvernements de gauche (1988-1993 ;1997-2002).

Plus récemment, en 2008, la Caisse des dépôts apporta, sous la contrainte, 2 milliards d’euros (sur les 3 investis par la France) pour le sauvetage de DEXIA... nous fûmes également seuls à dénoncer cette opération et à proposer déjà, en contrepartie, le schéma qui vient d’être entériné 3 ans plus tard : la séparation (CLF-CCB), la nationalisation et l’adossement à la CDC de l’activité de financement des collectivités locales dans une structure publique dédiée.

Et maintenant ?

Si nous ne pouvons qu’adhérer à la perspective de constitution d’une structure publique de financement des collectivités locales, adossée conjointement aux deux dernières institutions financières publiques, la CDC et la Banque Postale, de lourdes interrogations continuent de peser sur la suite de ce dossier :

Quel avenir pour les salariés :

Nous serons naturellement très attentifs à ce que l’ensemble des salariés de DEXIA-CLF retrouve un emploi correspondant à ses qualifications et son expérience sans pâtir de l’image catastrophique liée à la vente de produits toxiques dont ils ne peuvent pas être tenus pour responsables.

De la même façon, nous serons vigilants sur le fait que cette organisation future ne vienne pas déstabiliser ou menacer l’équilibre des emplois tant au sein de la CDC et de ses directions régionales que de la Banque Postale.

Qui va payer ?

Forcé par le gouvernement français, de renflouer DEXIA à l’automne 2008, en injectant 2 milliards d’euros à partir de ses fonds propres et des fonds d’épargne, le groupe Caisse des dépôts a perdu la quasi-totalité de « sa mise » (de 9,90 euros en 2008, l’action de DEXIA vaut aujourd’hui moins de un euro) tout comme ceux correspondant aux 14% du capital de DEXIA qu’elle possédait déjà. Dans ces conditions, on voit mal pourquoi, la CDC devrait à nouveau consacrer plusieurs centaines de millions d’euros (350 millions suivant les évaluations actuelles) au financement de la future société de crédit foncier censée reprendre l’encours de prêts aux collectivités locales, d’autant que depuis 20 ans, la Caisse des dépôts et les citoyens dont elle gère l’épargne ont ainsi été amenés à réinvestir plusieurs fois pour “racheter ce qu’elle possédait déjà” !

Et les emprunts toxiques ?

Le portefeuille d’emprunts consentis par DEXIA aux collectivités est évalué à 80 milliards d’euros dont 24 milliards seraient des prêts dit “structurés” ... c’est à dire nécessairement complexes voire toxiques (le portefeuille “toxique” est estimé à 10 milliards). Contrainte d’augmenter son niveau d’endettement pour reprendre ce portefeuille, la CDC ne peut, de surcroît, assumer la garantie sur ce portefeuille. On peut par ailleurs se demander si la garantie apportée par l’Etat français sera suffisante.

Dans ces conditions, nous revendiquons la mise en place d’un dispositif spécifique de taxation des dividendes des actionnaires des banques, destiné à alimenter un fonds de garantie permettant la renégociation de tous les emprunts toxiques concernant les collectivités locales et qui serait adossé à cette future société publique de crédit foncier.

Rappelons en effet que DEXIA n’est pas seule en cause (Crédit agricole, Caisses d’épargne, Crédit foncier... sont également concernés).

Quelles ressources pour le financement immédiat des collectivités locales ?

Afin de faire face aux besoins les plus urgents de financement des collectivités locales, le premier Ministre a annoncé la mise à disposition d’une enveloppe de 3 milliards d’euros à partir des fonds du livret A centralisés par la CDC, mis à disposition à parité entre la CDC et les banques privées. Nous contestons cette mesure (déjà essayée en 2008 à hauteur de 5 milliards et dont seule la CDC a joué le jeu). Celle ci risque en effet encore de diminuer la capacité de financement des logements sociaux dont nous avons tant besoin.

Au contraire, nous proposons que cette enveloppe soit prélevée sur la part d’épargne réglementée (Livret A+LDD = près de 100 milliards) actuellement laissée sans contrepartie à disposition des banques commerciales pour qu‘elles continuent leurs opérations spéculatives.

C’est également sur cette ressource que doit être financée ou adossée la nécessaire renégociation des emprunts toxiques en cours.

Paris, le 12 octobre 2011.

Etienne Adam
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