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Racisme, le retour du réfoulé ?
Hortefeux démission !

21 septembre 2009

par Etienne Adam



Adresse de l'article : http://anpag.org/article.php3?id_article=813



Oui Brice Hortefaux a tenu des propos racistes , la démonstration faite par Stéphane Beaud et Gérard Noiriel [1] dans leur article du Monde dans l’édition du 20.09.09. est très éclairante dans l’analyse du déroulé de la scène, analyse faite avec la rigueur que donne la pratique de la recherche en sciences sociales de ces universitaires.

Il s’agit écrivent les auteurs du retour du refoulé : « L’UMP » disent-ils en conclusion « a fondé sa stratégie politique sur l’ethnicisation des rapports sociaux, ce qui aboutit à enfermer les individus dans leurs origines ou leur couleur de peau. La célébration de "nos petits Arabes" bien intégrés - auxquels on accorde un strapontin gouvernemental quand ils font partie de l’élite, afin qu’ils fournissent tous les brevets d’antiracisme dont le pouvoir a besoin - va de pair avec la stigmatisation de ceux d’entre eux qui appartiennent aux classes populaires. Ce sont les deux facettes de cette politique identitaire que donnent à voir les images diffusées par le site Internet du Monde »..

Pour autant, est-ce un "lapsus significatif" involontaire de la part d’un Brice Hortefeux qui sait la présence du public et de la caméra de public Sénat ?

Je ne crois pas que le ministre de l’intérieur soit un imbécile seulement capable de faire des gaffes.

BHest quand même le plus proche compagnon d’armes de Sarkozy, est pour beaucoup l’inventeur de la stratégie de prise de pouvoir de de ce dernier. Ceci nécessite des qualités tactiques indéniables et l’on aurait tort de sous-estimer Brice Hortefeux.

C’est justement son rôle de stratège politique qui explique cette phrase.

Il ne s’agit pas d’une erreur, expression échappée à son auteur du refoulé d’ethnicisation des rapports sociaux de la stratégie sarkozyste, il ne s’agit pas non plus de l’expression d’un racisme personnel mais de ce qu’on peut appeler une « lepenerie », dans le cadre d’une démarche stratégique visant raller, à consolider les ralliement des électeurs d’extrême droite en leur tenant le discours qu’ils veulent entendre.

Comme Le Pen avec ses « dérapages », BH ne s’adresse pas à vous, à la majorité des français, quand il dit cela il s’adresse à tous ceux qui pensent qu’un arabe ça va( surtout quand c’est le voisin qu’on connait bien !) mais plus, c’est dangereux pour nous, braves français de souche comme ils disent.

L’objet n’est pas de produire du débat public autour de l’immigration mais de rappeler (opportunément au moment où l’UMP s’ouvre à « l’islamophobie distinguée  » de De Villiers ) que les dirigeants n’oublient pas ce sujet (ou ce fantasme).

Il s’agit ainsi, et aussi, de conforter un « racisme d’Etat  » [2]dont la constitution du ministère de l’identité nationale est le révélateur.

Pour ceux-là qui sont les acteurs de la mondialisation destructrice des espaces nationaux, des rapports sociaux nationaux (la destruction du système social à la française en détruisant systématiquement ses piliers : services publics, protection sociale, droit du travail...) il faut inventer inventer une compensation pour les masses.

Et cette compensation c’est la fermeture des frontières à "l’autre", c’est le renfermement sur le nationalitaire, c’est le repli sur une identité nationale fondée sur une reconstruction de l’histoire autour de la France éternelle contre la France des Lumières et de la Révolution.

Ainsi, ils s’imaginent tranquilliser le bon peuple en lui offrant une supériorité de petit blanc.

"C’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes" est la réponse aux craintes nées des délocalisation parce qu’il s’agit de monter au populo -en se mettant à ce qu’on croit être son niveau, le racisme banal- que l’on lutte contre la concurrence étrangère.

Les reconduites à la frontières avec leurs objectifs chiffrés médiatiques jouent la même fonction. Le discours sécuritaire sur les dangers internes ( les jeunes des quartiers) et externes « le terrorisme islamique » viennent compléter la panoplie de l’Etat qui protège ses nationaux.

Tout ceci est cohérent et il faut reconnaître à Hortefeux le mérite d’une vision d’ensemble, et le mérite d’un stratégie politique construite pour transformer profondément notre société en affaiblissant tout ce qui est collectif mais aussi tout ce qui faisait les valeurs communes issues de la Libération.

Bien sur ce sont les plus vulnérables qui font d’abord les frais des politiques concrètes que ce racisme d’Etat autorise : les rafles de sans-papiers seraient elles possibles si n’était pas mis en avant les danger de l’immigration, l’occupation militaire des quartiers populaires et les contrôles au faciès seraient ils possible si la présence de jeunes issus de l’immigration n’étaient pas perçue comme une menace...

En donnant à tous un statut d’étranger, au sens de différents de l’identité nationale, on prétend leur appliquer des lois d’exceptions faites pour eux, on laisse croire que l’inflation de la législation pénale n’est faite que pour ceux qui ne sommes pas comme nous.

En fait, et en droit, la loi et la même pour tous et ce sont nos libertés publiques qui sont atteintes par ce qu’on nous décrit comme mesures pour nous protéger.

Voilà pourquoi le racisme d’Etat est un poison qu’il faut combattre sans relâche, et ne tolérer aucun dérapage. Hortefeux doit démissionner, non parce qu’il est est racisme mais parce qu’il est ministre.

C’est peut être un bon auvergnat, quand bien même serait-il celui de la chanson de Brassens. Ce type de défense est stupide, ce n’est pas un problème de personne.

Pour l’instant encore, un ministre ne peut tenir des propos qui pourraient être de délits au regard de la loi contre le racisme. Le fait d’être investi de fonction publique et de les tenir en public en tant qu’homme public est une circonstance aggravante.

Il est des fautes politique qui ne peuvent être admise sous peine de cautionner une dérive régressive de notre société.

Etienne Adam


[1] Stéphane Beaud, professeur de sociologie à l’Ecole normale supérieure, coauteur de "Pays de malheur ! : un jeune de cité écrit à un sociologue", (La Découverte, 2004) Gérard Noiriel, historien, directeur d’études à l’EHESS, dernier ouvrage paru : "Immigration, antisémitisme et racisme (XIXe-XXe siècle). Discours publics, humiliations privées", (Fayard, 2007)

[2] on se contenterait du terme discrimination d’Etat si ne s’agissait que de séparer des nationalités mais là nous avons en plus pour des raisons historiques une ethnicisation de la discrimination c’est bien le signe d’une conotation racisme qui se fonde sur l’idée de l’inégalité entre les hommes sur la base de leur identité tehnique

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