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De mon coin au nord de Caen
Contribution d’un non candidat dans la 2eme Circonscription du Calvados

24 juin 2007

par Jean-Christophe Petite



Adresse de l'article : http://anpag.org/article.php3?id_article=472



J’ai lu les nombreuses réflexions envoyées par le secrétariat national, qui, à défaut de bien se comporter, diffuse largement les points de vue de ceux qui s’en plaignent.

Autant je trouve les questions posées tout à fait juste et méritant débat, autant je suis interrogatif sur les postures prises par tel ou tel.

Le premier malentendu vient du bilan. La description faite retraduit, certainement avec justesse, la vie des instances nationales mais aucunement la réalité de la vie des collectifs. Je partage avec les rédacteurs de ces contributions que la campagne présidentielle ne c’est pas inscrite suffisamment dans la bataille pour l’unité des courants anti-libéraux.

Je partage aussi l’idée qu’à Montreuil, il y a eu un coup de force, mais compte tenu de la situation, il n’était pas possible de renvoyer chacun à l’automne sans avoir posé, d’une manière ou d’une autre, la présence du courant anti-libéral unitaire pendant la période présidentielle et législative. J’y représentait un collectif qui déjà, compte tenu de la situation locale concrète, avait pensé à ce mettre en sommeil jusqu’après les élections.

Dans cette situation, il est simplement inévitable que ceux qui tentent de continuer à ce battre dans une perspective de reconstruction unitaire soient ceux qui vivent et animent, alors que beaucoup d’autres prennent le maquis dans leur organisation et sont contraints à en assumer la ligne.

Pour être précis sur le quotidien, j’assure aujourd’hui le secrétariat de deux collectifs, le Collectif Unitaire Anti-Libéral (dormant) et de Collectif local « Unis avec Bové » (qui se pose la question d’après).

L’œil trop rivé à la scrutation des mœurs du secrétariat national et des réunions nationales empêche la plupart des contributeurs de voir la situation réelle des collectifs surtout hors de Paris.

La bataille Unitaire

La bataille pour l’unité a bien eu lieu, pas tant au présidentielle puisqu’elle était perdue, mais aux législatives. Sinon, comment expliquer qu’à Lille dans la 3eme circonscription le candidat présenté sous étiquette PCF inscrive sur son tract dans les soutiens « Collectif de campagne Bové », comment expliquer qu’Alain Laffont, militant de la LCR depuis 1973, conseillé municipal de Clermont-Ferrand soit candidat labellé « Gauche Alternative 2007 », malgré l’envoi par la LCR d’un candidat parisien, comment expliquer que moi-même avec l’accord des collectifs « Unis avec Bové » j’ai renoncé à me présenter sur la 2eme circonscription du Calvados, circonscription où nous (L’Association pour de Nouvelle Perspective A Gauche) avions déjà présenté un candidat en 2002 et où nous aurions probablement fait le meilleur score en 2007 dans le Calvados (en plus une grosse avec plein de sous)...

La liste de ces cas est trop longue pour être citée exhaustivement. Sans parler des accords locaux remis en cause par les instances nationales comme dans l’Orne, etc...

Cette bataille n’a peut être pas eu lieu partout, mais elle a eu lieu. Elle a malheureusement été perdue dans bien des endroits en raison de la politique de la LCR, du PCF ou des Verts.

Le financement

Il faut lever l’hypothèque posée par Claude Debons sur l’histoire des financements et de SEGA. Si on veut être correct, il faut tout dire. Oui le problème de financement d’un certain nombre de groupes sur le plan national dépendait d’un nombre minimum de candidats présentés.

C’est le cas de l’ANPAG association bas-normande qui a fêté ses 20 ans d’existence, et qui grâce aux scores fait par ses candidats aux élections de 2002 (largement supérieurs à ceux de 2007) et grâce à SEGA, en regroupant diverses associations locales, permettait de bénéficier des financements publics. Pourquoi, alors que nous avons jeté toutes nos forces dans la bataille unitaire, en plus de l’échec global de cette tentative, il aurait fallu que nous renoncions à préserver l’accès au financement public.

Contrairement à ce que dit Claude, il ne s’agit pas de trouver des financements à une future organisation, mais de préserver les financements d’organisations qui existent déjà.

Autant je partage le point de vue de Claude Debons sur les invectives que j’ai entendu à la réunion de Montreuil (moins violentes toutefois que celles de l’Ile Saint Denis), autant je trouve son propos sur ce sujet plein de sous-entendus malsains.

Oui, la vie de groupes supposait, en l’absence d’accord avec d’autres forces, l’existence d’un minimum de candidats hors des grands partis pour que ceux qui se battent depuis des années puissent préserver une partie de leur financement, et alors ? Pierre Cours Salis a dit ça, c’est vrai et c’est au moins honnête.

La légitimité

Je reconnais à Eric Cocquerel un sens politique indéniable, mais quelle est sa légitimité.

Chez nous, combien de fois il a fallu que je défende le droit à l’existence de Mars et de la Gauche Républicaine, alors que l’audience de ces groupes ne dépasse pas celle de notre association locale.

Notre fonctionnement n’est pas démocratique ? Pas plus le CUIN que l’actuelle coordination. Je constate simplement qu’elle est pluraliste.

Dans l’histoire le CUIN a produit la réunion de l’Ile Saint Denis, le coup de force du PCF qui n’a même pas réussit à convaincre la majorité des militants du PCF présents dans la salle. Quelle est la légitimité de Jean-François Gau, à part d’être le porte-parole dans le CIUN du PCF, qui a participé au coup de force de l’Ile Saint Denis, autrement plus mortel que le coup de force de Montreuil.

Fernanda Maruccelli (PCF) est elle moins légitime, Jean Malifaud (LCR) est-il moins légitime au regard du combat pour l’unité du courant anti-libéral.

Faut-il considérer que ceux qui portent l’échec de l’Ile Saint Denis sont plus légitimes que ceux qui portent la mauvaise campagne de José Bové. Le problème est : est ce que la reconstruction d’un courant majoritaire peut s’appuyer sur l’échec de l’Ile Saint Denis. La aussi le défaut fondateur est patent.

La question de la légitimité de l’actuelle coordination ou secrétariat ne se poserait que s’il existait une alternative crédible pour la préparation des assises. Personne ne peut croire que le cartel d’organisations présent au CUIN peut en être le porteur.

La vie des collectifs

Je suis d’accord pour dire que la vie des collectifs est très diverse, mais surtout qu’il y a bien aujourd’hui deux origines aux collectifs. La première est issue de l’appel du 29 Mai, la seconde de l’appel à la candidature de José Bové.

Dans mon petit coin (au Nord de Caen, d’Hérouville à la mer), l’appel à des candidatures unitaires avait regroupé 96 signatures, et l’appel à la candidature de José Bové 95, mais seulement 27 signatures étaient communes aux deux appels (moins de sympathisants et de militants communistes, plus d’écologistes et d’alter mondialistes). Cette situation s’est confirmée sur l’ensemble du Calvados

Cet ensemble recouvre bien la surface du mouvement anti-libéral. A Hérouville cela a abouti à la constitution de deux collectifs distincts, malgré le vote en faveur d’un autre candidat que Marie Georges Buffet de la section locale du PCF, la fédération du PCF, la LCR et les Verts ayant décidés de présenter des candidats dans toutes les circonscriptions aux législatives.

Force est de constater que la candidature de José Bové a élargi l’écho des collectifs, le collectif « Unis avec Bové » reprenant à son compte les textes ambition et stratégie et les 125 propositions. La mise en sommeil du CUIL, n’est pas du à la candidature de José Bové, mais à la politique des partis dans la région. Le comble étant que le suppléant du candidat du PCF et la suppléante du candidat des Verts sont tous les deux signataires de l’appel pour des candidatures unitaires anti-libérales !!! C’est, entre autre, pour cette raison que nous avons renoncé à présenter une candidature, ce d’autant plus que nous l’avions déjà fait lors des élections cantonales avec grand succès pour le PS.

Il s’agit bien aujourd’hui de réunir les deux collectifs, c’est l’objectif que nous nous sommes fixé.

Revenir au politique

Le plus surprenant dans ces contributions, c’est que tout en soulevant des vrais questions aucunes ne rentre dans le débat, mais reste sur le discours « il y en a qui ont des intentions pas claires ». Excusez-moi, c’est un peu court.

La question est comment réunir l’ensemble du courant anti-libéral pour une transformation social, sans qu’il soit condamné à l’immobilisme.

Beaucoup de militants savent qu’une occasion historique a été manquée. La présidentielle a mis à nu l’incurie du Parti Socialiste. Le tout débouche sur une catastrophe : l’élection de Sarkozy à la présidence de la république.

Pour autant, peut-on espérer une réorientation dans le sens de la construction d’un mouvement politique unitaire de la gauche de gauche ? Rien n’est moins certain.

Peut-on croire que le prochain congrès du PCF va déboucher sur la construction d’une nouvelle force politique à gauche. Beaucoup de militants du PCF avec qui nous travaillons le souhaitent, mais c’est peu probable. Le retour sur scène de Robert Hue indique bien que la direction du PCF a renoncé à être autre chose que la caution minoritaire de gauche du Parti Socialiste. Toutefois nous devons pouvoir soutenir les militants qui se battent contre cette ligne. Comment ?

Les déclarations d’Olivier Besancenot sur la création d’un grand parti serait de bon augure, si la LCR rompait avec son actuel courant sectaire qui privilégie sa propre construction au détriment de la réponse politique qui devrait être apporté à la situation. Là seul un changement de majorité pourrait laisser un espoir. Comment aider les militants unitaires de la LCR ?

Peut être peut on espérer que les résultats des élections feront réfléchir les uns et les autres.

Notre histoire locale, celle de l’ANPAG créée à l’origine avec des militants communistes, des militants de la LCR et des Verts, nous a appris qu’il était pratiquement impossible d’intervenir sur le champ politique, en particulier pour les élections, tant que les partis sont ce qu’ils sont sans prendre le risque le l’éloignement des militants de ces divers partis. Il faut choisir disparaître ou avancer.

C’est cette même question qui était posée lors des présidentielles et des législatives à l’ensemble des collectifs. Et la réponse est claire, seule une partie peut affirmer la présence du courant de transformation sociale lors d’une élection.

La tâche n’est pas simple. Il faut à la fois permettre l’existence d’une force de proposition qui regroupe l’ensemble des militants des courants unitaires, indispensable à la reconstruction d’une pensée anticapitaliste, et permettre à ceux qui pensent, à juste titre, qu’il faut reconstruire une gauche de gauche, d’avoir un grand mouvement politique ayant une existence publique, y compris lors des élections. Peut on imaginer d’avoir une structure ayant une existence nationale de militants individuels avec une forme de présence des organisations fonctionnant sur la base de la recherche de consensus et en même temps permettre qu’une partie de ces membres se manifeste lors d’événements politiques spécifiques. C’est peut être à cela que nous devons réfléchir.

Je crains toutefois que l’échec des présidentielles et des législatives renforce les réflexes grégaires de survie des organisations. Et pourtant, la structuration des organisations du mouvement ouvrier née de la guerre de 1914 et de la révolution de 1917 est historiquement morte, il faut reconstruire.

Jean-Christophe Petite
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