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Urgence pour les droits et les libertés

Intervention de la LDH au nom des organisations appelantes

 

le 4 septembre 2010 à Caen au rassemblement devant la préfecture

En 2007 Nicolas Sarkozy nous avait promis une « démocratie exemplaire » « une République irréprochable ». Or depuis 3 ans nous assistons à une aggravation des injustices au profit des plus riches, au choix du démantèlement inexorable des acquis du Conseil national de la Résistance qui fondaient une République sociale où le collectif l’emporte sur l’individualisme.

Cette politique est massivement rejetée : échec cuisant aux élections régionales, cote de popularité à un niveau jamais atteint, opposition à la contre réforme des retraites, le tout sur fond de crise économique et enfin scandales politico-financiers liés à des conflits d’intérêts.

Face à un tel bilan le recours à de vieilles recettes s’est imposé cet été avec force annonces et décisions spectaculaires, juridiquement douteuses au regard de la Constitution et assurément inefficaces au plan des objectifs proclamés. Le démantèlement des camps de Roms et leur expulsion hors de nos frontières en sont l’exemple emblématique, mais les peines de prison pour les parents de mineurs délinquants récidivistes, la déchéance de nationalité pour certains criminels, les menaces de sanctions pour les maires « ne se conformant pas à leurs obligations de maintien de la sécurité » font aussi partie de l’arsenal déployé cet été.

Que cachent ces outrances dites sécuritaires ? Si on peut y voir la nécessité de se « refaire » électoralement en rognant sur l’extrême droite, c’est surtout l’idéologie libérale de la responsabilité individuelle qui est portée là à son paroxysme.

Elle pose comme postulat que tous les individus sont égaux quelques soient leurs conditions sociales et de vie, et de ce fait sont entièrement responsables de leurs choix y compris celui d’être délinquants.

Ce retour au tout sécuritaire a déjà été organisé par moins de service public, moins d’éducation, moins de police de proximité au profit de plus de contrôle, de mises en garde à vue, plus d’actions coup de poing, plus d’humiliation et par une surenchère technologique ( Tasers - caméras de vidéosurveillance - fichage biométrique, contre lequel un recours a été déposé par la LDH, le GISTI et l’IRIS,... ), verbale et législative.

Depuis 2002 pas moins de 13 lois ont été votées sur la sécurité, plus de 30 ont modifié le code pénal parmi lesquelles la comparution d’urgence, les peines plancher, les peines incompressibles, les établissements éducatifs fermés,....et demain les soins (forcés) sans consentement véritable garde à vue psychiatrique sans contrôle.

Des observateurs parmi les plus avertis constatent que la plupart de ces mesures sont soit inapplicables, soit inopérantes. Déjà les États Unis et la Grande Bretagne font de timides marches arrière après un constat d’inefficacité. Le dernier rapport Romeurope apporte lui aussi les preuves de la contre productivité des reconduites aux frontières.

Qui plus est la moitié de ces reconduites sont illégales, notamment parce qu’assimilables à des punitions collectives et du seul fait de l’origine, contrairement à ce qu’affirme le gouvernement français.

Des organismes internationaux indépendants comme le CERD ( ONU ) demandent aux autorités françaises de condamner les discours racistes ou xénophobes émanant de responsables politiques afin de ne pas alimenter le racisme. La presse du monde entier dénonce les dangers de cette politique : la France pays des droits de l’homme est montrée du doigt pour ses dérives racistes. Or notre gouvernement, pourtant si donneur de leçons par ailleurs, loin de respecter ses obligations internationales, se réfugie dans l’indifférence et la dénégation.

En France même, à côté des protestations des très nombreuses organisations que nous représentons ici, la CNCDH, commission nationale consultative des droits de l’Homme, se dit préoccupée par la succession de déclarations officielles à caractère discriminatoire à l’encontre des gens du voyage, des Roms, des Français d’origine étrangère, des mineurs délinquants et de leurs parents.

Elle déplore cette modalité d’élaboration des lois dans l’urgence et l’improvisation contournant l’avis du Conseil d’État. Elle appelle « une politique cohérente, stable, lisible  », assurant comme le veut notre Constitution, dont le Président de la République devrait-être garant : « l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race, de religion ».

Cette commission préconise « un renforcement des mesures préventives et éducatives accompagnées de moyens humains et financiers plus appropriés à un État de droit". On ne saurait être plus clair !!

Combien de temps devrons-nous supporter que l’équilibre sur lequel repose tout système pénal, entre protection des libertés individuelles et défense de la société soit à ce point mis à mal ?

Combien de temps tolèrerons- nous des discours électoralistes sécuritaires xénophobes ?

Combien de temps accepterons-nous que les banlieues soient abandonnées, qu’aucune solution pérenne ne soit trouvée pour l’accueil des gens du voyage et des Roms, au mépris de la loi, de leur intégration et de la scolarisation indispensable de leurs enfants ?

Combien de jeunes seront dans une situation économique désespérée faute d’avoir acquis les savoirs et les qualifications nécessaires avant que nous réagissions ? Refusons cette politique qui divise en désignant des boucs émissaires.

Nous vous invitons à signer et faire signer l’appel citoyen " Face à la xénophobie, Non à la politique du pilori " pour refuser toute politique de la peur et de la haine, à l’occasion du 140ème anniversaire de la proclamation de la République et pour dire ensemble notre attachement à la liberté, l’égalité et à la fraternité qui sont et resteront notre bien commun.

NON A LA XENOPHOBIE ET A LA POLITIQUE DU PILORI : LIBERTE-EGALITE-FRATERNITE

GISTI : groupe d’information et de soutien des travailleurs immigrés IRIS : imaginons un réseau internet solidaire

11 septembre 2010


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