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Pour une politique choisie et non plus subie

Déclaration de Nanterre du collectif ACLEFEU ( Association Collectif Liberté, Egalité, Fraternité, Ensemble, Unis) - qui a vu le jour au lendemain des révoltes sociales qui ont secoué le pays au mois de Novembre 2005, suite à la mort de deux de nos enfants, Bouna et Zyad, à Clichy sous bois.

Voici la déclaration qui a été lue à la réunion des collectifs le 15 octobre dernier à Nanterre

Lisez là faites là connaître, pour montrer que peuvent vivre et agir dignement de gens à qui cette société fait des conditions de vie indignes.

Un exemple de construction politique populaire qui participe bien d’une démarche pour changer la politique

 

Depuis plus de 40 ans, tous les gouvernements qui se sont succédés à la tête du pays, qu’ils soient de droite ou se prétendent de gauche, n’ont jamais cessé de protéger les privilèges des riches et de priver notre peuple ainsi que tous les étrangers vivant en France, de la juste redistribution des richesses produites grâce à notre travail à tous.

Au service des possédants, ils continuent de s’acharner contre nous, simples citoyens, en bradant notre patrimoine national : industriel, technologique, énergétique, scientifique et en s’attaquant à notre système social. Tandis que nous nous organisons pour maintenir un minimum de solidarité face aux exclusions qu’engendre leur politique, ils poursuivent et amplifient la casse de cet instrument si précieux pour nous, qu’est le service public de la santé, de l’éducation, de l’emploi. Comme jamais, ils assèchent également les moyens des associations chargées d’accompagner et d’organiser les populations pour faire face à cette récession.

A grand renfort de cadeaux fiscaux, d’exonérations, d’aides publiques aux entreprises, ils ont réussi à généraliser l’abaissement des salaires, le travail précaire, la flexibilité - n’ont pas empêché ni pénalisé les délocalisations - et avec le passage à l’euro, ont mis à genou notre pouvoir d’achat.

Ils économisent sur tout ce qui vise à améliorer la vie à commencer par le logement... Et au delà des effets d’annonces, rien n’a changé pour favoriser l’égalité des chances et des droits face aux études, à l’emploi, la santé, la culture, les loisirs. Usant des médias presque tous acquis aux puissances financières, ils ont joué la carte de la division des communautés, culturelles, ethniques ou religieuses, opposant les catégories sociales entre elles, stigmatisant certaines pour mieux les reléguer à l’état de pauvreté.

Si l’on ajoute à cela :
-  que tous les appareils exécutifs chargés d’administrer leurs directives, cumulent en parallèle, des dysfonctionnements internes tels, qu’il est pratiquement infaisable d’appliquer les quelques « dispositions » supposées compensatrices du recul social produit par leur régime,
-  et que par ailleurs, tout est en place, pour écraser et enfermer les laissés pour compte de leur désastre économique, soit par des pratiques policières incriminant les gens au lieu de les défendre, soit par des déferlements médiatiques les désignant coupables quant ils sont victimes,

... alors pour nous, nos enfants, nos familles, nos quartiers, la vie est devenue irrespirable et indigne.

Notre collectif ACLEFEU (entendez : Association Collectif Liberté, Egalité, Fraternité, Ensemble, Unis) - a vu le jour au lendemain des révoltes sociales qui ont secoué le pays au mois de Novembre 2005, suite à la mort de deux de nos enfants, Bouna et Zyad, à Clichy sous bois.

Pour que l’on puisse dire qu’ils ne sont pas morts pour rien, nous nous sommes fixés pour mission d’aller à la rencontre de la population dans toute sa diversité, et de faire remplir aux gens des cahiers de doléances afin d’établir un rapport sous forme d’état des lieux et de propositions, que nous remettrons à 1’Assemblée Nationale lors d’une grande marche citoyenne le 25 octobre prochain.

Nous avons sillonné le pays à bord de 2 bus affrétés pour l’occasion, posé nos tréteaux dans 120 villes de France et recueillies ainsi plus de 20 000 constats et doléances portant sur le logement et le cadre de vie, l’emploi et la précarité, l’éducation et la petite enfance, la justice et les pratiques policières, la citoyenneté, le vote des immigrés et la politique, la situation des femmes, les questions intergénérationnelles et la communication, l’insécurité et l’environnement, la répartition des richesses et les inégalités, la santé et le handicape, les discriminations et l’exclusion, le transport et l’isolement, la culture et les religions, les loisirs.

A l’heure où nous vous parlons, nous avons enregistré et analysé plus de 12 000 de ces contributions en tête desquelles arrivent dans l’ordre : les revendications sur le logement, l’emploi, l’éducation et l’orientation, l’arrêt des discriminations et des inégalités, le contrôle des pratiques policières, l’équité des décisions de justice.

Loin de se désintéresser de la politique, nombre de ces personnes parmi lesquelles, une majorité âgée de 18 à 25 ans, ont exprimé l’exigence de voir les partis et leurs élus, être plus proches des habitants et des réalités de terrain, non pas pour déverser des programmes tout fait pensés dans le secret de leurs cabinets, mais pour construire avec les habitants, en respectant leurs propositions, une politique juste et courageuse qui s’attaquerait en priorités aux causes de la pauvreté et de l’exclusion.

Le caractère inédit de notre démarche et 1’adhésion suscitée par notre projet nous ont confortés dans notre détermination à poursuivre l’action au-delà de cette date. Nous ne prétendons pas détenir la vérité absolue ni toutes les solutions aux problèmes mais nous avons décidé de prendre notre destin en main et de ne plus nous laisser confisquer la parole par qui que ce soit.

Nous clamons haut et fort à ceux qui ont pris l’habitude de décider à notre place : Mesdames, Messieurs : Dorénavant vous ne pouvez plus faire sans nous. Quant à ceux qui s’interrogent sur la durée de vie de notre collectif et sur son rôle après la Marche des Doléances, nous répondons que même si au début, notre objectif était celui de remonter la parole du peuple d’en bas à ceux qui décident là haut, et de mettre des mots sur ses maux, au fil des jours nous nous sommes sentis investis d’une mission encore plus grande et qui consiste à provoquer ce rapprochement tant attendu entre ces quartiers abandonnés à eux-mêmes, et une classe politique pas assez à l’écoute et souvent en panne d’inspiration. Nous profitons de cette tribune pour vous alerter sur la nécessité et l’urgence de rencontrer ces citoyens afin de bâtir avec eux, les solutions aux situations indignes qu’ils subissent.

Nous vous demandons de tout faire pour que notre marche des doléances, le 25 octobre, soit le plus large rassemblement possible de personnes qui, aux côtés des résidents des quartiers délaissés, veulent que la parole de la population prévale dans les campagnes en vue des prochaines élections et qu’il soit enfin possible pour nous, de construire la politique et au lieu de la subir - même si nous n’appartenons à aucun parti.

Notre rassemblement se fera à Denfert-Rochereau à partir de 14h pour une marche en direction de l’Assemblée Nationale qui débutera à 15h. Déjà, nous savons par courrier, que le Président Jean-Louis Debré refuse de nous recevoir.

Nous pèserons de tout notre poids pour que les exclus s’inscrivent massivement sur les listes électorales et choisissent leur candidat en fonction de sa capacité à construire une politique en concertation avec les citoyens.

22 octobre 2006


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